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Lenguaje

versão impressa ISSN 0120-3479

Leng. vol.47 no.1 Cali jan./un. 2019

https://doi.org/10.25100/lenguaje.v47i1.7181 

Artículos

Futurs enseignants de FLE étudiant à l’étranger : effets du séjour linguistique et culturel sur leurs identités analysés à partir de leur récit de vie

Futuros profesores de francés como lengua extranjera y estudios en el extranjero: efectos de la estancia lingüística analizados a la luz de sus narrativas

Future French as a Foreign Language teachers studying abroad: linguistic stay effects based on their narratives

Doris Colorado López1  1

1Universidad de Antioquia, Medellín, Colombia. Correo electrónico: doris.colorado@udea.edu.co


Résumé

Beaucoup de futurs enseignants de langues étrangères partent étudier dans le(s) pays où la langue qu’ils enseignent est parlée, cela constitue une expérience bouleversante. Le fait d’intégrer une culture différente et socialiser en utilisant une langue étrangère modifie les manières d’appréhender la réalité, ce qui entraîne des conséquences sur le regard sur soi et les autres. Un séjour linguistique et culturel à l’étranger aurait donc des effets sur les constructions identitaires des (futurs) enseignants. L’identité, considérée d’un point de vue dynamique, évolue et se construit dans l’interaction, interaction qui se déroule dans le pays d’accueil grâce au langage. Cet article présente les résultats partiels d’une recherche qualitative où nous avons analysés des aspects identitaires mis en discours dans le récit de vie de neuf enseignant(e)s de FLE colombien(ne)s.

Mots-clés : futurs enseignants de FLE; récit de vie; identité

Resumen

Muchos profesores de lenguas extranjeras van a estudiar en el país donde se habla la lengua que enseñan, lo que constituye una experiencia devastadora para algunos. Integrarse en una cultura diferente y socializar por medio de una lengua extranjera modifica las maneras de aprehender la realidad, lo cual modifica la manera de verse a sí mismo y de ver a los otros. Una estancia lingüística y cultural en el extranjero tendría entonces efectos sobre las construcciones identitarias de los (futuros) profesores. La identidad, considerada desde un punto de vista dinámico, evoluciona y se construye en la interacción, interacción que se da en el país de acogida gracias al lenguaje. Este artículo pretende presentar los resultados parciales de una investigación cualitativa donde analizamos aspectos identitarios en las narrativas de nueve colombianos, futuros profesores de francés como lengua extranjera.

Palabras clave: futuros profesores de FLE; narrativas; identidad

Abstract

Many foreign language teachers study in the country where the language they teach is spoken, which often results in an overwhelming experience. Integrating into a different culture and socializing through a foreign language modifies both the way we apprehend reality and the way we perceive ourselves and others. Being in contact with another language and another culture abroad would affect the identity constructions of future teachers. Identity, considered from a dynamic point of view, evolves and is built through interaction, a phenomenon that occurs in the host country and in which language plays an important role. This article reports partial findings of a qualitative research where we analyzed identity aspects in the narratives of 9 future Colombian French teachers.

Key words: future French teachers; narratives; identity

INTRODUCTION

Quitter son pays natal pour aller s’installer dans un pays où on parle une autre langue, que ce soit pour poursuivre des études ou pour travailler, constitue une expérience bouleversante. Partant de l’idée que chaque culture est organisée par et à travers le langage, le fait d’intégrer une culture différente et de socialiser en utilisant une langue étrangère va modifier les manières d’apprendre la langue, ainsi que les manières d’appréhender la réalité, ce qui aura des effets sur le regard sur soi et les autres. Autrement dit, un séjour linguistique et culturel aurait des effets sur l’identité des locuteurs puisqu’elle est dynamique, évolue et se construit dans l’interaction, interaction qui se déroule grâce au langage.

En Colombie, nous n’avons pas trouvé d’études publiées se concentrant sur l’impact que le séjour linguistique et culturel dans le pays de la langue cible peut avoir sur les constructions identitaires des locuteurs et la façon dont ils perçoivent et donnent à voir leurs identités. Dans d’autres pays, les travaux menés dans les domaines de la sociolinguistique, l’analyse du discours et la didactique des langues se penchent principalement sur les trajectoires d’apprentissage et l’influence des mobilités géographiques sur la recomposition du répertoire verbal. Molinié (2006a), par exemple, affirme que les étudiants, possédant une compétence plurilingue et pluriculturelle toujours en évolution, se rendent compte qu’ils peuvent « tisser des liens » entre ce qu’ils ont appris dans leurs pays et les connaissances formelles qu’ils acquièrent dans l’université étrangère, entre les apprentissages formels et les apprentissages dans des contextes informels dans la vie quotidienne. Cette réflexion porte également sur la manière d’apprendre la langue puisque l’étudiant en contexte francophone fait appel à des stratégies différentes à celles utilisées dans son pays d’origine où il utilisait la langue étrangère principalement en milieu institutionnel. Certaines de ces études visant particulièrement les étudiants étrangers constituent des apports pour la réflexion sur l’« évolution [de leur identité] au contact de la culture étrangère rencontrée en pays d’accueil » (Galligani, 2000, p. 23), suite à cette expérience de migration qui a pu entraîner « la perte de repères identitaires ». Autrement dit, l’étudiant venu d’ailleurs est amené à remanier et ajuster sa/ses identité(s) au contact de la culture étrangère. Parmi ces recherches, sur lesquelles nous reviendrons dans la discussion des résultats, nous trouvons celle de Molinié (2006a) qui a étudié le cas des étudiants européens (ERASMUS) en mobilité en France. Baroni et Jeanneret (2008) ont également analysé l’expérience de deux étudiantes indiennes suivant une formation de FLE à l’EFLE (École de Français Langue Étrangère) à Lausanne, Suisse. Charbonneau (2008), pour sa part, a analysé « les malentendus éducatifs et culturels qui émergent de la rencontre de deux cultures académiques » chez des étudiants étrangers suivant des cours en immersion dans une université française où ils se retrouvent « confrontés à des modes de pensée et à des systèmes de représentation différents » (p. 201), ce qui confirme que chaque langue est un prisme spécifique à travers lequel on est contraint d’appréhender la réalité.

Dans la présente contribution, nous envisageons de présenter les résultats partiels d’une étude d’intérêt didactique et sociolinguistique conduite auprès d’étudiants colombiens en France. Pour ce travail, nous avons recueilli leurs récits de vie dans le but d’analyser leur discours concernant les effets du séjour linguistique et culturel sur l’identité conçue comme le résultat de l’histoire conversationnelle des locuteurs (socialisation, réseaux, etc.) et de la dynamique de l’interaction que constitue l’entretien. Nous nous sommes également intéressée à la manière dont l’apprentissage du français, d’abord en Colombie (contexte alloglotte) et puis en France (contexte homoglotte) a pu modifier leur Imaginaire Linguistique, leurs stéréotypes sur le pays d’accueil et sur les Français et leurs effets sur l’appropriation de la langue et de la culture francophones. En même temps, étant donné que les étudiants participant à cette étude étaient ou seraient des enseignants de FLE, nous avons tenu à contribuer, grâce aux échanges produits par ce travail, à leur formation en tant qu’apprenants et enseignants réflexifs mais ces aspects ne seront pas traités ici. Dans cet article, nous nous centrerons sur les résultats liés aux effets du séjour linguistique sur les facettes identitaires des participants.

CADRE THÉORIQUE

D’ores et déjà, il convient de préciser l’une des notions centrales de notre réflexion à savoir celle d’identité. Elle sera suivie d’une définition des concepts de récit de vie et de biographie langagière.

L’identité

Cette notion a, en effet, été utilisée selon des acceptions diverses. Elle a été définie comme étant unique et fixe et associée à un territoire ou à l’appartenance à un groupe. Cependant, les travaux réalisés dans le champ interactionniste ont montré que la définition de l’identité ne pouvait se restreindre à de telles associations reposant sur un point de vue essentialiste. Montrant que l’identité est le produit d’un processus dynamique, ces travaux ont fait apparaître qu’elle pouvait être plurielle, d’autre part qu’il existe des facettes identitaires, voire des gestes identitaires que Vion (2000)a appelé « des identités circonstancielles » (p. 80). Dans cette perspective, l’autre et l’expérience sociale jouent un rôle important dans la production de la conscience de soi. Le consensus aujourd’hui est que « chaque individu (et chaque groupe) peut disposer, successivement ou même simultanément, de plusieurs identités dont la matérialisation dépend du contexte historique, social ou culturel où il se trouve » (Lipiansky, Taboada-Leonetti et Vasquez, 1990, p. 18). Ces auteurs parlent de « stratégies identitaires » faisant référence à « des procédures élaborées en fonction de l’interaction » (p. 24). Ces « stratégies identitaires » nous permettent de considérer les identités au pluriel. En ce sens, Charaudeau et Maingueneau (2002) soulignent que :

L’identité résulte (…) des conditions de production qui contraignent le sujet (…) [et] qui sont inscrites dans la situation de communication et/ou dans le préconstruit discursif, et des stratégies que celui-ci met en œuvre de façon plus au moins consciente. (p. 300)

D’après Kastersztein (1990) l’identité est « une structure polymorphe, dynamique, dont les éléments constitutifs sont les aspects psychologiques et sociaux en rapport à la situation relationnelle à un moment donné d’un agent social (individu ou un groupe) comme acteur social » (p. 28). Les acteurs sociaux ont des comportements «fluctuants et adaptatifs » (p. 30), ce qui leur permet d’évoluer en fonction des situations. Mais il y a aussi des éléments stables, que Kastersztein appelle « le noyau dur » des caractéristiques identitaires, qui rendent parfois difficile l’adaptation de groupes ou individus à un contexte culturel nouveau.

Tous les auteurs consultés accordent une grande importance à l’interaction dans la construction de l’identité, identité et altérité formant un couple indissociable. Nombreux sont ceux qui s’appuient sur les travaux des précurseurs dans le champ de l’interactionnisme symbolique (Mead, 1934/1963), la sociologie interactionnelle (Goffman, 1959/1973) et la phénoménologie. Vasquez (1990), par exemple, s’appuie sur les travaux de Goffman pour considérer que les identités « s’actualisent dans un processus d’échange socialement situé » (p. 145). Lipiansky (1990) cite également les travaux de Goffman, ceux de Georges H. Mead et de Jean-Paul Sartre pour affirmer que « la conscience de soi dépend de l’interaction avec autrui » (p. 174). Taboada-Leonetti (1990) soutient que « l’identité apparaît comme une sorte de « boîtes à outils», chaque « outil » étant un élément identitaire que le sujet choisit en fonction de l’interaction dans laquelle il se trouve » (p. 46). L’identité est liée à la prise de conscience de soi qui se fait en percevant l’autre comme étant différent, c’est le « principe d’altérité » introduit par Charaudeau et Maingueneau (2002), qui affirment qu’« il n’y a pas de conscience de soi sans conscience de l’existence de l’autre, (…) c’est à la mesure de la différence entre « soi » et « l’autre » que se constitue le sujet » (p. 299). Cette conscience identitaire se réalise donc dans l’échange, ils rejoignent Benveniste (1966) quand il dit qu’« il n’y a pas de je sans tu, ni de tu sans je: le tu constitue le je» (p. 260).

Récit de vie ou biographie langagière ?

Selon Deprez (1996) « le sens que l’individu donne à une action « lourde » comme l’apprentissage d’une langue, par exemple, s’appréhende en grande partie par les propos explicites que le locuteur tient lui-même sur son apprentissage ou sa bilingualité » (p. 2). D’où l’importance de l’approche biographique qui a abouti à la construction de deux notions, à savoir le récit de vie et la biographie langagière. Ces notions reposent sur des techniques différentes (entretiens, questionnaires écrits) afin d’aborder des aspects de la vie des apprenants de langues.

La biographie langagière (récit de langues) et le récit de vie (parfois nommé récit autobiographique, récit de parcours ou autobiographie) sont des notions utilisées par divers chercheurs dans le domaine de la narratologie, la sociolinguistique (Baroni et Jeanneret, 2008; Deprez, 2002) et la didactique des langues et des cultures (Bertucci, 2006; Castellotti, 2006; Lévy, 2008; Molinié, 2006b; Perregaux, 2006) afin de favoriser la prise en compte des parcours d'apprentissage dans la construction des compétences plurilingues/pluriculturelles des publics en mobilité ou en migration internationale, ou comme outils pour questionner la place et le rôle de l’idéologie dans l’approche didactique aux langues (Lévy, 2008), analyser les représentations des langues et de leur apprentissage (Castellotti, 2006); ou bien analyser le processus de construction des identités et du plurilinguisme (Bertucci, 2006; Pavlenko, 2001).

Castellotti (2006) utilise la notion de biographies langagières et considère qu’il s’agit d’un ensemble de traces d’origine diverse : mémoires de contacts linguistiques et culturels, témoignages de l’évolution d’apprentissages formels ou informels, preuves éventuelles de séjours ou de certifications. Dans une perspective didactique, elle y associe deux dimensions : avoir une meilleure compréhension des atouts plurilingues des locuteurs et favoriser le développement d’une conscience réflexive sur l’apprentissage et l’usage des langues à plusieurs niveaux. Dans une biographie langagière l’individu raconte « les éléments constitutifs de son expérience dans les domaines linguistique et culturel » (Molinié, 2006b, p. 6). Lüdi (2005, cité par Thamin et Simon, 2009) définit la biographie langagière comme « une sous-catégorie de récits de vie, caractérisés par un inventaire spécifique de thèmes et de figures » (p. 4).

En revanche, pour Bertaux (2010) « il y a du récit de vie dès lors qu’un sujet raconte à quelqu’un d’autre, chercheur ou pas, un épisode quelconque de son expérience vécue » (p. 35). C’est en effet une conception que ce sociologue appelle « minimaliste » du récit pour indiquer qu’il suffit que dans un entretien apparaisse de la forme narrative pour qu’il y ait du récit. Le récit de vie est une notion qui encadre non seulement le rapport aux langues étrangères mais aussi d’autres événements significatifs de la vie du sujet, ce qui ne veut pas forcément dire qu’il faut qu’il raconte toute son existence, il peut se concentrer sur un épisode qui a déclenché un changement suite à une nouvelle expérience. En effet, Bertucci (2006) argumente que « c’est la construction du récit qui fait émerger le sujet » (p. 128), avec son rapport aux langues, y compris sa langue maternelle et son identité plurilingue dont les traits constitutifs deviennent explicites lorsqu’il se raconte.

La biographie langagière se limite à la trajectoire linguistique ou histoire langagière de l’individu et les rapports qu’il entretient avec les langues. Le récit de vie, quant à lui, permet « d’inscrire le sujet dans son historicité » (Thamin et Simon, 2009, p. 7). Notre intention étant d’analyser le parcours de vie des étudiants, nous avons opté pour le récit de vie car cela nous permettrait d’explorer l’événement migratoire, d’identifier les raisons du choix et de tisser des liens entre les composantes du parcours de vie et d’apprentissage. Suivant Pavlenko (2001), nous considérons que :

Les histoires d’apprentissage sont des sources d’information uniques et riches concernant la relation entre la langue et l’identité (...). Il est possible que seuls les récits de vie permettent de donner un aperçu de ces régions si privées, si personnelles, et si intimes qui sont rarement - ou pas du tout - considérées dans l’étude de l’acquisition d’une langue seconde et qui sont au même temps le cœur et l’âme du processus de socialisation. (p. 167, notre traduction2)

De ce point de vue, les récits de vie seront une manière de mettre en forme l’expérience vécue dans le but de la rendre intelligible à soi-même et à autrui. C’est une introspection qui contribue au développement de la réflexivité de celui qui se raconte.

METHODOLOGIE DE RECHERCHE

Collecte de données et participants

Nous avons mené une étude de terrain auprès de 9 étudiants colombiens (3 femmes et 6 hommes) en utilisant le récit de vie comme outil principal, construit en entretien. L’intérêt de l’entretien en tant qu’événement interactionnel repose sur le fait qu’il s’agit, selon Codó (2008), d’une « situation communicative authentique » et donc la source de « données langagières réelles » (p. 158). De plus, cette technique donne plus de contrôle aux participants sur ce qu’ils disent et la manière dont ils le disent. Ils peuvent donc raconter les événements importants de leur existence suivant un ordre chronologique et thématique qui ne leur est pas imposé de l’extérieur. Nous avons choisi l’entretien semi-directif ou « entretien interactif » (Bres, 1999) car, au contraire des autres types d’entretiens, il favorise l’interaction verbale où l’intervieweur a le rôle d’interlocuteur ayant pour objectif de faire parler mais participant activement avec l’enquêté à la construction du discours. Nous avons élaboré un guide d’entretien contenant les thématiques à aborder et un consentement éclairé que les participants ont tous signé.

Concernant les participants, Verónica, Milena et Fernando étaient en France depuis 2011. Armando et Jerónimo ont quitté la Colombie en 2012. Julián est arrivé à Paris pour débuter son M1 en 2013. Santiago a débarqué à Paris en 2006, il est rentré en Colombie en 2007 et reparti en 2011. Sara est arrivée en Île de France en 2009, elle est rentrée en Colombie en 2010 et repartie en 2012. Oscar était dans la région de Rhône-Alpes depuis 2010. Ils ont été d’abord assistants de langue vivante dans des lycées français, sauf Jerónimo et Julián. Ils ont terminé leurs études de Licence en Didactique du FLE au sein de 5 universités en Colombie situées dans 5 départements différents et ils poursuivaient des études de master en Didactique du FLE ou en Sciences du Langage dans 3 universités françaises situées à Paris, Lyon et Grenoble (cf. Tableau récapitulatif des entretiens).

Corpus

Les entretiens qui composent notre corpus ont été réalisés pendant le mois de février et mars 2014, en France, dans 4 villes situées dans deux régions différentes : Ivry-sur-Seine et Paris (Île de France), Chambéry, Grenoble et Saint Martin d’Hères (Rhône-Alpes). Il s’agit d’un corpus constitué dans des conditions similaires : durée (une heure à peu près) et lieu d’enregistrement (domicile du participant ou de la chercheuse). Afin de garantir leur anonymat, leur prénom a été remplacé par un pseudonyme qu’ils ont souvent choisis eux-mêmes. Tous les entretiens ont été transcrits intégralement à l’aide du logiciel SONAL3, développé par le sociologue Alex Alber, enseignant chercheur à l’Université François Rabelais, à Tour. Les caractéristiques principales des interviewé(e)s sont résumées dans le Tableau 1, ci-dessous.

Tableau 1 Participants. 

Prénom Sexe Département d’origine Université en Colombie Université en France Ville en France Année d’arrivée en France Date de l’entretien Durée
Jerónimo M Valle del Cauca Universidad Santiago de Cali Université Sorbonne Nouvelle Ivry-sur-Seine 2012 06/02/2014 1:03:48
Verónica F Cundinamarca Universidad Javeriana Université Sorbonne Nouvelle Paris 2011 07/02/2014 55:12
Julián M Caldas Universidad de Caldas Université Sorbonne Nouvelle Paris 2013 22/02/2014 1:11:09
Armando M Antioquia Universidad de Antioquia Université Stendhal-Grenoble 3 Saint Martin d’Hères 2012 24/02/2014 1:00:53
Milena F Cauca Universidad de Cauca Université Stendhal-Grenoble 3 Saint Martin d’Hères 2011 24/02/2014 31:47
Fernando M Antioquia Universidad de Antioquia Université Stendhal-Grenoble 3 Grenoble 2011 24/02/2014 1:04:18
Oscar M Santander Universidad de Antioquia Université de Lyon Chambéry 2010 25/02/2014 55:03
Sara F Caldas Universidad de Caldas Université Sorbonne Nouvelle Paris 2009-2010 2012 11/03/2014 53:01
Santiago M Cauca Universidad de Cauca Université Sorbonne Nouvelle Paris 2006-2007 2011 22/03/2014 1:36:37

Méthode d’analyse de données

Nous avons effectué une analyse qualitative de contenu suivant une approche inductive et déductive. En d’autres termes, certaines catégories ont été préétablies à partir de la littérature tandis que d’autres catégories ont émergé des données mêmes (Creswell, 2007 ; Freeman, 1998 ; Miles et Huberman, 1991). Nous avons suivi les étapes proposées par Burns (1999): les données ont été assemblées, codées, comparées et interprétées pour finalement rendre compte des résultats. Suite à la transcription, nous nous sommes livrée à une recherche des thématiques majeures correspondant à nos thématiques du guide d’entretien. Cette étape a servi de fondement à une analyse du contenu, de ce qui est dit. Nous avons ensuite soumis quelques extraits des entretiens à une analyse du discours afin de montrer comment se construisaient discursivement des catégories relatives à l’identité et à l’évolution des images et des stéréotypes. Nous avons également analysé des aspects ayant trait à la co-construction du discours dans l’interaction. Nous avons effectué une analyse à l’aide des composantes de l’Appareil Formel de l’Énonciation, proposé par Benveniste (1970, 1974), dont nous mentionnerons quelques aspects.

RÉSULTATS ET DISCUSSION

Tout d’abord il nous semble important de mentionner un phénomène d’insécurité linguistique par lequel quelques étudiants ont traversé. Ensuite, nous tâcherons de présenter les transformations identitaires évoquées dans les récits.

L’accent étranger comme cause d’insécurité linguistique et comme marque d’identité

Face à des locuteurs natifs, certains étudiants ressentent de l’insécurité linguistique du fait de leur accent qu’ils aimeraient gommer. Ce concept est apparu dans les travaux de Labov (1966) sur la stratification sociale des variables linguistiques à New York. Labov (1972/1976) indique que « les fluctuations stylistiques, l’hypersensibilité à des traits stigmatisés que l’on emploie soi-même, la perception erronée de son propre discours, tous ces phénomènes sont le signe d’une profonde insécurité linguistique chez les locuteurs de la petite bourgeoisie » (p. 200). Il s’agit de « l’opposition entre usage personnel et usage correct » (p. 200) conduisant à une auto-dévalorisation de son propre parler. Cette notion peut être appliquée aux étrangers qui, conscients de leur non-légitimité dans la communauté linguistique, s’efforcent d’atteindre une compétence comparable à celle des locuteurs natifs notamment au niveau de l’accent. Dans sa thèse portant sur l’insécurité linguistique des professeurs non natifs, Roussi (2009) indique que les professeurs grecs de français ressentent de l’insécurité linguistique du fait de leur accent. Il en va de même pour le cas particulier des étudiants-enseignants colombiens. Cette situation est parfois provoquée par des remarques faites par des locuteurs natifs, remarques auxquelles certains sont plus sensibles, et dont les effets vont d’une gêne subtile (Sara) à parfois un blocage, comme c’est le cas de Verónica (205-206)4: «Je me rappelle que quand je commençais à parler en français tout le monde commençait à dire "ah, t'as un petit accent", et ça ça me bloque un peu».

Mais cet accent est aussi une marque de leur identité linguistique. En effet, plusieurs interviewés signalent de manière explicite que leur accent constitue leur « identité » (Jer357, Fer167). Verónica (506-509), par exemple, revendique son identité d’étrangère car son accent est ce qui indique aux autres qu’elle est différente, qu’elle n’est pas française : «je sais que l'accent ça fait partie aussi de ton identité, voilà, qui te dit que tu n'es pas d'ici». Oscar (216-222) considère qu’il a «beaucoup d’accent», mais cela fait partie de ce qu’il est : «je peux pas nier ce que je suis ». Fernando (134-167) mentionne spontanément le fait d’avoir un accent et il conclut que c’est son identité. Comme nous l’avons annoncé plus haut, l’analyse du contenu a été complétée par une analyse du discours concernant les enjeux identitaires afin d’approfondir la réflexion. Charaudeau et Maingueneau (2002) soulignent que « dans une perspective d’analyse du discours, la prise en compte de l’énonciation est évidemment centrale » (p. 230). Nous nous attacherons donc à rendre compte de la façon dont l’énonciation participe à la construction des identités et comment les étudiants prennent en charge leur discours. Il nous semble intéressant de faire l’analyse de cet extrait5 grâce aux outils de l’analyse du discours :

  • -Fernando (17) : J’ai une stratégie\ c'étai:t l'imitation\

  • -Chercheuse (18) : Ouais

  • -Fernando (18) : Mais y a aussi un problème/ que quand j'imite/ je sens que: c'est pas moi/ et je peux le faire pour un moment/ et je peux me mettre à parler comme un français/ en imitant\ mais après si je veux dire quelque chose que c'e:st de moi/ dans la VRAIE vie/ je peux pas le faire comme ça\ ((rires))

  • -Chercheuse (19) : Alo:rs quand tu parles comme toi tu parles comment ?

  • -Fernando (19) : Comme je parle maintenant\ tu vois/ je ga:rde encore beaucoup mon accent espagnol\ et je pourrais imiter/ les français mais ça: c'est pas naturel\ dans la conversation spontanée ça marche pas\

  • […]

  • -Chercheuse (21) : Alors quand tu dis que: quand tu imites l'accent pour parler comme un VRAI français/ disons/ et tu sens que c'est pas toi/ euh ça veut dire que tu n'aimerais PAS te débarrasser de ton accent de: colombien/

  • -Fernando (21) : Peut-être c'e:st implicite ça\ je le fais pas exprès\ de garder mon accent\ mais explicitement je crois qu'il veut rester là ((rires))

  • -Chercheuse (22) : ((rires)) et tu veux qu'il reste là aussi\

  • -Fernando (22) : Comme prof de français\ parce que j'aimerais être un bon prof de français\ je crois que: je devrai:s beaucoup améliorer ça\ mais après le côté pratique ça m'amuse aussi\ de: de garder mon accent\ c'est ++ c'est mon identité je crois\ c'est moi ((rires))

Quant aux déictiques de la personne (Benveniste, 1970), Fernando utilise le « je » de l’énonciation, c’est le « je » qui énonce et qui ancre ces énoncés dans le moment de l’énonciation, « je » fonctionne dans tous les cas comme un embrayeur. Il y a une seule occurrence de « tu » («tu vois ?») qui pourrait être interprétée comme le tu de l’allocutaire qu’il inclut dans son énonciation. Concernant les déictiques de la temporalité, Fernando se sert du présent de l’énonciation (« comme je parle maintenant ») et le présent itératif ou présent d’habitude incluant le présent de l’énonciation dans une temporalité qui se répète, Perret (1994) l’appelle présent dilaté. On trouve aussi un présent générique («c’est pas naturel») qui renvoie à « une vérité qui perdure : émis par n’importe quel énonciateur en n’importe quelle situation, [l’]énoncé demeure valide » (Maingueneau, 2007, p. 83). Seul le présent de l’énonciation ou présent linguistique se rapporte à l’instant de l’énonciation. Le déictique temporel «maintenant» ainsi que les temps verbaux utilisés montrent que l’énonciateur s’inscrit dans une temporalité plus large qui inclut son existence antérieure et sa vie en France. Si on analyse les modalités d’énonciation, il commence par un énoncé déclaratif ou assertif « j’ai une stratégie», après il annonce sa stratégie à l’aide d’un présentatif : «c’était l’imitation». L’énoncé déclaratif est contredit par «mais» qui lui sert à introduire une proposition coordonnée où il explique son aperçu face à sa stratégie, la conjonction «si» introduit une condition à laquelle est soumise sa stratégie, montrant l’émergence de deux facettes identitaires qui s’opposent : son identité réelle qu’il déploie dans «la vraie vie», dans une «conversation spontanée» et une identité fausse lorsqu’il «imite» la façon de parler des français.

Nous avons aussi essayé d’analyser quelques aspects interactionnels, à savoir la co-construction des énoncés, les offres de sens et les reprises. Si on prend en compte l’interaction dans cet extrait, on remarque que le «ouais» de la chercheuse en 19 ne constitue pas un vrai tour de parole puisqu’il s’agit de ce qu’on appelle en linguistique interactionnelle un continueur « ayant pour fonction principale d’inviter le locuteur en place à poursuivre » (Kerbrat-Orecchioni, 2005, p. 37), c’est un « signal d’écoute » ou régulateur. Fernando reprend donc son discours qui introduit un élément nouveau à sa stratégie (une contrainte). Notons en 21 un phénomène de négociation (Vion, 2000) où la chercheuse fait une reformulation introduite par «ça veut dire que… » qui va aider Fernando à construire son discours. Les questionnements de son allocutaire poussent Fernando à aller plus loin dans sa réflexion et l’amènent à mettre en avant une de ses facettes identitaires, celle de colombien et donc d’hispanophone, et l’amènent à conclure que son accent c’est son «identité». Les facettes identitaires déployées dans l’entretien sont donc construites par les deux interactants lors de l’échange dans l’entretien. La question de l’accent n’était pas prévue dans le guide d’entretien et il se peut que Fernando n’ait jamais associé auparavant son accent à son identité de colombien. C’est une réflexion faite au moment de l’interaction et grâce à elle.

Sara (478-483) est la seule à ne pas associer son accent à une de ses facettes identitaires, elle indique qu’elle fait des efforts pour parler comme une «française» mais elle n’est pas gênée par le fait qu’on lui dise qu’elle a un accent : «ce qui me gêne c'est le fait de ne pas arriver - je peux pas arriver à avoir vraiment un accent français ». En fait, elle affirme qu’elle ne perdrait «rien» (304) si elle perdait l’espagnol ; par contre, «le français c’est vraiment quelque chose» (331). Elle considère que parler français lui donne plus de possibilités dans la vie en général, notamment «au niveau du travail» (228) ; être français, suisse ou belge est plus important qu’être colombien ou latino-américain. Il est clair qu’elle n’est pas consciente du fait que le français est aussi parlé en Afrique mais elle argumente en disant que le français qu’on apprend n’est «PAS forcément le français […] de l'Afrique» (279). Elle est donc consciente qu’il y a une variété qui jouit de plus de prestige, un français normatif qui est plutôt celui de la France. On voit donc que cette survalorisation du français est directement proportionnelle à son souci pour gommer son accent d’étrangère afin de parler comme une française. Regardons cet extrait (Sar254-266) :

  • -Chercheuse: Pourquoi tu dis que tu préfères le français à l'espagnol ?

  • -Sara: +++ je pense que c'est plutôt question de, je ne sais pas, je vais dire peut-être une bêtise mais peut-être question de reconnaissance

  • -Chercheuse: De statut ?

  • -Sara: Voilà c'est ça, parce que si tu dis que tu parles espagnol ((elle fait un geste et un son pour indiquer que c'est pas grand-chose)), soit tu es espagnol, soit tu es sud-américain, les sud-américains ((elle fait encore une fois le même geste accompagné du son qui indique que ce n'est pas grand-chose)), par contre si tu dis que tu parles français, ta langue maternelle c'est le français, WOW, soit tu es français, soit tu es suisse, soit tu es [canadien]

L’image que Sara a de l’espagnol reflète en quelque sorte les résultats d’une étude conduite par Moris (2003), auprès d’enseignants de français au Pérou. En citant cette recherche, Moore (2006) affirme que « nombre de ceux-ci ont choisi l’apprentissage du français, et plus tard son enseignement pour cacher leurs racines amérindiennes et leurs langues, le quechua ou l’aymara » (p. 31).

Quelles transformations identitaires ?

À l’occasion de ce séjour linguistique et culturel, le regard que les étudiants ont d’eux-mêmes s’est modifié, ils affirment tous qu’ils ont beaucoup changé même si parfois ils ne trouvent pas les mots pour expliquer ce qui a changé chez eux (Julián, par exemple). Il s’agit des apprentissages tout au long du séjour, des expériences vécues qui contribuent aux transformations identitaires. Tous les étudiants évoquent un avant et un aprèsleur départ à l’étranger : comment ils étaient en Colombie quand ils n’avaient jamais vécu à l’étranger et comment leurs expériences en France les ont changés.

Les travaux auprès d’étudiants étrangers ont montré que la mobilité internationale et éducative, que ce soit volontaire ou imposée, avec ou sans difficultés, remet en question « la perception de l’autre et de soi, la communication, le rapport qu’on entretient avec les/ses langues, la légitimité de sa place dans le monde » (Lévy, 2008, p. 71). Certaines études telles que celles de Baroni et Jeanneret (2008), Charbonneau (2008) et Molinié (2006a, 2006b) montrent, par exemple, que l’expérience en contexte étranger provoque une modification des représentations linguistiques et culturelles, et une évolution de l’identité chez les étudiants étrangers résultant de l’interaction avec une autre culture et avec d’autres locuteurs dans les différentes situations auxquelles ils doivent faire face.

Molinié (2006b) ajoute qu’en contexte exolingue il y a une conscientisation plus élevée de l'apprentissage d’une langue qu’en contexte endolingue et cette conscientisation entraîne ce qu’elle appelle « un questionnement identitaire » (p. 89). Dans la même lignée, Baroni et Jeanneret (2008)vérifient l’hypothèse que « les nouvelles socialisations langagières que ces étudiantes expérimentent donnent sens à leur vécu en pays francophone et contribuent à modifier leur manière de se percevoir en tant que personne » (p. 101). Il y a donc une évolution et questionnement de soi et une réflexion de la part de l’individu se trouvant dans un contexte étranger. Un questionnement qui sera fait grâce au langage parce que « c’est dans et par le langage que l’homme se constitue comme sujet ; parce que le langage seul fonde en réalité, dans sa réalité qui est celle de l’être, le concept d’« ego » » (Benveniste, 1966, p. 260).

Ouverture d’esprit sur la diversité dans le monde

L’ouverture d’esprit est une qualité récurrente lors des entretiens. Les étudiants considèrent qu’ils ont «une vision plus étendue du monde» (Jer493), qu’ils comprennent «mieux le monde entier» (Mil117) : «je suis plus sensible aux regards des autres» (Mil118). Fernando, par exemple, présente des caractéristiques de son identité sociale (Taboada-Leonetti, 1990) ou objective (Lipiansky, 1990) : «je suis catholique» (319). Il rend aussi explicite son identité personnelle (Lipiansky, 1990) ou discursive (Charaudeau, 2009; Charaudeau et Maingueneau, 2002) : «j’adore poser des questions» (335), «j’ai beaucoup de préjugés» (354). Il indique que pour lui « c'était normal la religion catholique» (321). C’est sa «culture» qu’il associe à des pratiques spécifiques : «aller à l’église, faire les prières» (320), pouvoir manger du porc. Mais il explique comment son parcours et son séjour en France l’ont aidé à ouvrir son esprit («être ici m’a ouvert les yeux», 317), ce qui l’amène à questionner l’idée qu’il a de la normalité. Cette confrontation avec la diversité contribue à sa prise de conscience de la différence : «le monde est si complexe  », «on est tous si différents» (319). La transformation est produite par la confrontation des cultures, la prise de conscience de la différence menant à une prise de conscience de la complexité. Fernando va se resituer par rapport à un nouveau monde qui l’a «beaucoup impressionné» (265) : «moi je suis catholique» (319) mais depuis «plein de choses ont changé» (316) ; ce qui veut dire que la normalité a changé.

Prise de conscience de l’interculturalité

Les étudiants colombiens débarquent tous à Paris et pour certains le contact avec la «vraie France» comme ils l’appellent a été une sorte de choc, ce à quoi ils ne s’attendaient pas. Regardons cet extrait (Fer256-265) :

  • -Fernando: […] et je suis arrivé à Paris, et mon premier contact c'était avec le métro où j'ai commencé à voir que des étrangers, des migrants et des choses que - en Colombie on n'est pas habitués à être à côté de, d'un musulman qui porte des vêtements typiques, à côté d'un chinois, d'un africain, alors j'étais complètement perdu, c'est pas ça la France mais où est-ce que je suis ?

  • -Chercheuse: Oui, c'est pas ça l'image de la France que tu avais

  • -Fernando: Non, pas du tout, c'était Paris, Paris ((rires)), alors, ça m'a beaucoup impressionné et j'étais ++ pas bloqué mais j'étais très "où est-ce que je suis ?

On remarque que Fernando se sentait complètement perdu et qu’une source d’étonnement a été le flux migratoire en France qu’il ne connaissait pas. L’immigration a aussi étonné Santiago (408) et Jerónimo qui dit qu’«on n'a pas ces impressions en Colombie» et qu’«on attend jamais ça» (200-201). Certains comme Verónica, par exemple, sont déçus dès leur arrivée en France et commencent à se construire une image négative du pays : «tu retrouves une image qui est complètement triste», «t'es déçu complètement» (409-410). Quoi qu’il en soit, ce contact avec une autre culture et manière de voir le monde a aidé les étudiants à une prise de conscience interculturelle définie comme « la connaissance, la conscience et la compréhension des relations, (ressemblances et différences distinctives) entre « le monde d’où l’on vient » et « le monde de la communauté cible » » (Conseil de l’Europe, 2001, p. 83). Cette recherche a été donc l’occasion pour que les étudiants (enseignants) y participant fassent une introspection à leurs expériences en France et les apprentissages qu’ils peuvent en tirer au niveau personnel, académique et professionnel. Par ailleurs, les « récits de parcours » encouragent l’étudiant à effectuer « un questionnement sur son apprentissage et la construction de son répertoire bi-ou plurilingue et, par conséquent, sur la formation de son identité sociale et culturelle » (Molinié, 2006a, p. 89). C’est une manière de les inciter à la réflexion et à leur implication dans leur propre formation. Selon Vasseur (2000), la « démarche réflexive » est une approche proposée par des acquisitionnistes, des praticiens, des didacticiens et des enseignants de langues qui entraîne « la prise de conscience et l’attention portée à l’objet d’apprentissage, (…) la mise en place d’activités métacognitives, métacommunicatives et métalinguistiques et (…) une modification des attitudes et des compétences » (p. 48). On revient au rôle essentiel de la langue pour rendre explicites et conscients les apprentissages en contexte homoglotte et développer la réflexivité chez les (futurs) enseignants de FLE. Selon Lévy (2008), les récits autobiographiques « attribuent à l’observé un statut d’observateur qui lui permet de partager (…) la parole, l’analyse et l’interprétation des parcours » (p. 72).

Disparition ou modification de stéréotypes

Quant à l’image du pays étranger, certains mentionnent la disparition des stéréotypes liés à la France, aux Français ou à d’autres cultures. Armando dit le suivant : «ce qui a changé le plus c'est surtout mes représentations sur la France […] parce qu’avant d'y venir moi je pensais que c'était le paradis» (490-492) et il ajoute : «je me suis rendu compte que c'est, en fait c’est un pays qui comme le mien a beaucoup de problématiques» (497-498). Jerónimo dit avoir éliminé certains « clichés » qu’il avait entendus en Colombie à propos de Paris qui la dessinaient comme «la ville romantique» (520) car il trouve que «c’est une ville normale» (521) ; à propos de la nourriture il croyait que « c’était seulement la baguette» (522) mais il voit qu’il y a d’autres choses. Il a également supprimé des idées par rapport aux Français qui sont considérés comme des gens «romantiques» et «classe» (538), il pense que les Français «qui sont pas sortis de leur pays» (544-545) sont «plutôt froids dans leur manière d'être» (543-544). Cependant, il témoigne avoir rencontré d’autres Français qui sont «ouverts d'esprit» (545-546). Il affirme qu’«on voit les choses différemment» en France (532). Santiago (666-710) indique que le séjour en France lui a permis de mettre de côté « les stéréotypes et les idées figées des cultures et de la façon de penser des autres». La métaphore d’une sculpture ou d’une image qui se débarrasse des choses inutiles lui sert à exemplifier un processus de «structuration» et de «formation» grâce à cette expérience à l’étranger qui l’«a plus formé, façonné». Comme tous les participants, Santiago évoque un déplacement par le biais du verbe arriver et se situe en France par l’usage du déictique spatial ici. Ce sont les expériences vécues dans cette période spécifique de son existence qui ont fait changer sa manière de voir le monde.

Appropriation de modèles culturels et traits de caractère de la société française

Au niveau personnel, ils ont mentionné certaines caractéristiques, qu’ils attribuent à la manière d’être et d’agir des Colombiens, qu’ils ont modifiées pour adopter d’autres attitudes propres au caractère des Français qu’ils considèrent plus positives. Oscar (160-166), par exemple, indique le suivant :

Oui une chose que j'ai apprise ici et c'est vraiment à savoir maitriser le temps / à être vraiment organisé et savoir que- par exemple on se projette à l'année et pas juste "la semaine prochaine je vais faire telle chose" des fois on est comme ça en Colombie \ et là ici il faut vraiment où est-ce que tu veux arriver tu vois / donc je vais aller au bout et je vais me fixer certains objectifs certains buts et je vais y arriver \ donc c'est bien euh et là le fait de bien BIEN organiser les choses ne pas laisser les choses à la dernière minute comme ça on va improviser on va voir qu'est-ce qui se passe.

Oscar mentionne une caractéristique des Colombiens : on fait les choses à la dernière minute, on ne planifie pas, on ne se projette pas, on improvise. Par l’usage du pronom « on » renvoyant à un nous inclusif, il englobe tous les Colombiens y compris lui-même et son interlocutrice. Il oppose à cette attitude des Colombiens, la manière d’être des Français en ce qui concerne l’établissement d’objectifs clairs, et le fait d’aller jusqu’au bout des choses.

Le séjour en France et le partage avec des Français et leur côté «râleur» (Ver671) les a aidés à «être critiques, à aller plus loin» (Ver673-674) et à être moins «conformistes» (Ver678), à être plus ouverts et moins enfermés dans leur cercle d’amis (Mil114-115) et plus réflexifs (Jer487). Ils s’accordent tous à dire que vivre et étudier à l’étranger est une expérience enrichissante qui les a fait grandir, qui les a formés plus (Mil348, San668) comme personnes. Sara (618-660), par exemple, dit que suite à ce séjour en France elle est exigeante et plus stricte, et elle se préoccupe plus pour la formation et l’apprentissage. Elle indique également que les autres remarquent qu’elle est différente (les gens, ses parents). Elle présente un contraste entre les caractéristiques des personnes appartenant à deux lieux : la Colombie («là-bas») et la France («ici»). Elle se situe aussi par rapport à un passé à l’aide de l’imparfait («je faisais pas ça») et par rapport à un moment présent à l’aide du déictique temporel «maintenant» qui englobe une période plus large que le moment de l’énonciation. Tout cela l’amène à conclure que des choses ont changé en elle grâce à ce séjour à l’étranger : «je lis beaucoup, je suis l'actualité, j'essaie d'apprendre par ci par là ». Ce sont des attitudes qu’elle n’avait pas quand elle était en Colombie et c’est à travers le contact avec des gens en France, francophones ou non, qu’elle a vu l’importance de la lecture, par exemple.

Renforcement du sentiment de fierté et patriotisme

La plupart aiment la France et l’expérience qu’ils y ont vécue. Certains indiquent qu’ils portent «un regard plus objectif» (Jul414) et «plus critique» (San715) sur leur pays, et ils ont commencé à «connaitre l’histoire» et à se questionner par rapport aux causes et origines de la «violence» (San717-719). Il y a un sentiment de patriotisme qui s’est réveillé ou qui s’est fortifié suite au séjour dans ce pays étranger. En effet, à l’exception de Sara, ils se sentent fiers d’être colombiens, de leurs origines : «c'est quand tu voyages que tu commences à mettre en valeur ta culture» (Ver521-522). Il nous semble pertinent de montrer l’analyse du discours d’Oscar (410-478), étudiant qui voulait faire sa vie en France et qui se considérait plus français que colombien :

  • -Oscar (38) : Si je perds mon espagnol ben je perds ++ mes racines et ce que je suis quand même parce que je suis ce que je suis parce que je suis né en Colombie et parce que j'ai appris l'espagnol par cœur parce que voilà je suis né là-bas / mais c'est vrai que au même temps / tu es ce que tu es là où tu es et dans ce moment-là je suis en France et voilà

  • -Chercheuse (39) : Et tu t'identifies plus ++

  • -Oscar (39) : À la France maintenant parce que je suis / et plus de temps je passe en France je suis moins - de plus en plus détaché de la Colombie dans ce sens tu vois ? je ressens que maintenant que je - écoute je suis allé une fois en Colombie \ je suis resté deux mois \ la dernière fois un an après je suis resté un mois et cette fois j'ai envie d'y aller mais je veux rester trois semaines

  • -Chercheuse (40) : ((rires)) Tu diminues encore plus le temps que tu vas y passer

  • -Oscar (40) : Oui parce que là par exemple la dernière fois pour moi c'était beaucoup aussi mais je sais que c'est peu mais au même temps je voulais retourner \ c'est horrible mais c'est comme ça […]

  • -Oscar (41) : Mais en général je vois que

  • -Chercheuse (41) : Tu es de plus en plus détaché

  • -Oscar (42) : Oui c'est ça ((rires))

  • -Chercheuse (42) : Tu deviens de plus en plus français ? ((rires))

  • -Oscar (43) : Ben tout doucement je crois oui \ c'est horrible

  • -Chercheuse (43) : Tu aimes mais au même temps ça te gêne ça te gêne pas ?

  • -Oscar (44) : Non mais j'aime bie:n mais simplement que ++ des fois je me dis c'est un peu euh un colombien qui écoute un colombien dire qu'il veut être français c'est un peu quand même ++ je ne sais pas peut-être gênant / il va dire « ah mais celui-là qu'est-ce qu'il croit ? » voilà non la Colombie parce que j'aime bien je suis ++

  • -Chercheuse (44) : Il se croit sorti de la cuisse de Jupiter

  • -Oscar (45) : Exactement voilà il se croit oui il a la grosse tête et tout non mais non moi j'aime bien la Colombie / et je suis très fier d'être colombien simplement que euh le fait d'être là et que tu t'attaches vraiment à ce pays \

  • -Chercheuse (45) : Ouais tu es attaché à la France

  • -Oscar (46) : En plus tu n'as pas de projets / par exemple toi tu as un projet / tu veux travailler / tu retournes en Colombie / bon et en plus il y a la contrainte de la bourse

  • -Chercheuse (46) : Oui mais de toute façon je voulais retourner

  • -Oscar (47) : Et même si tu ne l'as pas voilà tu voulais mais moi non / j'ai pas vraiment - ma famille mais au même temps je sais que ++ mes parents ils m'ont dit « tu fais comme tu veux même si on veut que tu viennes mais tu restes là où tu veux vraiment être » voilà et là c'est comme je t'ai dit hein ? […] je suis colombien et tout mais dans ce moment je suis en France / je fais ma vie en France / et je passe la plupart du temps en France voilà \ donc je me sens vraiment ++ plus français quoi mais je suis pas français mais bon mais

  • -Chercheuse (47) : Mais tu te sens plus d'ici

  • -Oscar (48) : D'ici exactement pas forcément français mais plus d'ici voilà

Oscar utilise le « je » de l’énonciation qui indique qu’il prend en charge ses énoncés. Cependant, il prend parfois distance de ses énoncés quand il se sert de la non-personne au lieu de « je » : (« il veut être français »). Il n’ose pas affirmer «je vais être français ». Un autre élément qui laisse voir cette prise de distance est l’utilisation d’un tu générique où il aurait pu mettre un « je » : « tu es ce que tu es là où tu es », « tu t'attaches vraiment à ce pays », « tu n'as pas de projets ». Au fil de ses tours de parole on se rend compte des raisons de cette distance, il considère que ses compatriotes vont juger d’une manière négative le fait qu’il s’identifie plus à la France. Oscar implante également son allocutaire en face de lui à l’aide d’un « tu » embrayeur (« tu as un projet, tu veux travailler, tu retournes en Colombie », « même si tu ne l'as pas, voilà, tu voulai s »), d’une expression phatique («tu vois? ») et d’une modalité injonctive («écoute »). Ces unités construisent un discours ancré dans la situation d’énonciation et témoignent de l’attention portée par Oscar à sa partenaire dans l’interaction. En effet, tout ce qu’il dit est plus au moins conditionné par son interlocutrice et la façon dont il pense qu’elle va réagir : le fait de ne pas dire directement qu’il se sent plus français, par exemple. La plupart d’occurrences du présent correspondent à un présent itératif ou d’habitude qui englobe aussi le moment de l’énonciation : «je suis en France, je suis là, je ressens, j'ai envie, je veux rester, je vois, je crois, je me dis, j'aime bien la Colombie, je suis colombien, je me sens vraiment plus français, je fais ma vie en France, je passe la plupart du temps en France». Des aspects de l’identité sociale sont ainsi construits grâce à ce présent itératif : son identité de colombien dont il est fier, par exemple. À l’aide des déictiques spatio-temporels, Oscar se situe par rapport à deux endroits : la Colombie, le pays qui est éloigné («là-bas») et qui fait partie de son passé et la France, le pays de son présent («dans ce moment, maintenant, là »). Dans son discours nous identifions une grande contradiction représentée par l’usage répété du connecteur « mais » (12 fois) indiquant une opposition, et par l’adjectif évaluatif «c’est horrible» (2 fois) précédé une fois d’un verbe d’opinion («je crois») qui constitue aussi un marqueur de subjectivité. Oscar est fier de ses origines mais il se sent plus français.

On remarque également la co-construction du discours en entretien par les deux protagonistes. En 39 et 41, par exemple, on observe des co-constructions d’énoncés parce que c’est l’allocutaire qui complète par une interruption ou suite à une pause. En 42 et en 48, Oscar accepte « l’offre de sens » (Glady, 2008) de son allocutaire par le biais de modalités adverbiales («exactement») ou d’énoncés assertifs «oui, c’est ça». L’acceptation de l’offre de sens dans le dernier tour de parole de cet extrait pourrait être interprétée comme une tentative de garder la face de la part d’Oscar puisqu’il se trouve face à une colombienne qui pourrait aussi juger de manière négative le fait qu’il se croit plus français que colombien.

CONCLUSIONS

S’appuyant sur les travaux de Bertaux (2010) et Beaud (1996), Nossik (2014) affirme qu’en sciences sociales, pour la plupart des recherches, il s’agit d’extraire des récits de vie des données factuelles ou des points de vue subjectifs. C’est donc une analyse de contenu qui est effectuée. Mais en linguistique, les récits de vie doivent être considérés comme « des activités configurantes qui donnent sens à ce qui est raconté et dont l’intérêt réside précisément dans la re-catégorisation des expériences sociales vécues à travers les choix discursifs du narrateur » (p. 8). C’est cette approche que nous avons essayé d’adopter en effectuant une analyse du discours focalisée sur l’énonciation.

Tout comme Brubaker (2001), nous considérons les identités « comme multiples, fragmentées et fluides » (p. 70). Nous adoptons donc une posture constructiviste. L’identité des individus n’est donc pas prédéterminée mais façonnée par les multiples possibilités que leur offre leur parcours et les situations dans lesquelles ils interviennent. Dans le cas du récit de vie, Ochs (2014) indique qu’ils jouent un rôle important dans le processus de construction identitaire car « mettre en récit une expérience personnelle est un moyen d’accroître la conscience de soi présente chez tous les êtres humains » (p. 38). Dufour (2014) considère qu’il y a une co-construction de l’identité dans la mesure où « le narrateur « ne se raconte » que parce que le narrataire « se fait raconter » » (p. 54).

La réflexion menée jusqu’ici a été une tentative de démontrer l’intérêt de l’approche biographique pour analyser la mise en mots des aspects identitaires des enseignants de FLE se trouvant dans un pays étranger. De plus, ce type d’enquête s’avère enrichissante pour celui qui accepte de se raconter car il aura l’opportunité de faire un retour sur soi et de développer sa réflexivité. Morin (cité par Molinié, 2006b) affirme qu’« avoir vécu une expérience ne suffit pas pour que cette expérience devienne de l’expérience. Il faut sans cesse la régénérer et la re-méditer. Si nous transformons l’expérience en conscience, nous sommes prêts pour un nouveau commencement » (p. 6).

En guise de conclusion, le travail mené dans le cadre de cette recherche a été bénéfique pour tous les participants, y compris la chercheuse. Ces 9 étudiants-enseignants de FLE témoignent des effets d’un séjour linguistique et culturel à l’étranger. Des effets qui peuvent être sur le plan didactique ainsi que sur le plan identitaire. On a constaté que les images et les stéréotypes liés aux cultures évoluent ou disparaissent et que la manière de voir le monde est différente. Étant donné que l’interaction joue un rôle prépondérant pour la construction des identités, l’importance de l’altérité, dans la vie de tous les jours ou dans une situation d’entretien, est indéniable. Nous avons constaté que les (futurs) enseignants de FLE ont changé la vision qu’ils avaient d’eux-mêmes en tant que sujets plurilingues suite à l’expérience de mobilité et de séjour à l’étranger. Cette nouvelle manière de se percevoir soi-même aurait des retombées didactiques car « seul le fait de revisiter, de défiger, de revoir les représentations peut contribuer à faire évoluer pertinemment les attitudes, et par corollaire les aptitudes et les actions (didactiques et pédagogiques en l’occurrence) » (Carrasco et Piccardo, 2009, p. 26).

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1Magíster en Ciencias del Lenguaje de la Universidad Sorbona Nueva - París 3, Francia; Licenciada en Lenguas Extranjeras de la Universidad de Antioquia, Colombia; miembro del grupo EALE (Enseñanza y Aprendizaje de Lenguas Extranjeras) y docente del programa de Licenciatura en Lenguas Extranjeras de la Universidad de Antioquia. Sus áreas de investigación son la formación de maestros, la didáctica de las lenguas extranjeras y la sociolingüística (plurilingüismo).

2 Language learning memoirs are unique and rich sources of information about the relationship between language and identity (…). It is possible that only personal narratives can provide a glimpse into areas so private, personal, and intimate that they are rarely – if ever – breached in the study of SLA, and that are at the same time at the heart and soul of the second language socialization process.

3Pour plus d’informations concernant le logiciel SONAL, vous pouvez consulter le site suivant : http://www.sonal-info.com/

4 Nous avons numéroté les lignes pour faciliter la référence à certains extraits cités dans l’analyse. Quand nous faisons référence au corpus on utilise des codes contenant les trois premières lettres du prénom du participant suivies du numéro des lignes, le code Osc399 correspondrait donc à la retranscription du récit d’Oscar et à la ligne 399.

5Conventions de transcription : [ début du chevauchement entre deux locuteurs, ] fin du chevauchement, ++ pauses moyennes, +++ pauses longues, / et \ notent les montées et descentes intonatives, : notent des allongements syllabiques, les MAJUSCULES notent une emphase particulière sur une syllabe ou un mot, ou augmentation de l’intensité, les signes ° ° notent un volume bas de la voix, xxx notent un segment incompréhensible ou inaudible, - note auto-interruption, ((rire)) entre parenthèses doubles sont notés nos commentaires, ainsi que des phénomènes non transcrits (paraverbal ou non verbal), ( ) entre parenthèses sont notés les résumés des extraits que nous ne transcrivons pas.

Received: December 05, 2017; Accepted: June 15, 2018

Cet article est dérivé d’une recherche conduite en 2014 dans le cadre du master 2 en Sciences du Langage à l’Université de Paris 3-Sorbonne Nouvelle.

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