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Folios

Print version ISSN 0123-4870

Folios  no.56 Bogotá July/Dec. 2022  Epub Nov 10, 2022

https://doi.org/10.17227/folios.56-13527 

Artículos

Une histoire à enseigner? Tentative d'une déconstruction et reconstruction de l'histoire de la francophonie*

¿Una historia para enseñar? Tentativa de una deconstrucción y reconstrucción de la historia de la francofonía

A history to teach? Attempt at Deconstruction and Reconstruction of the History of Francophonie

Nathalia Lamprea-Abril** 
http://orcid.org/0000-0002-7064-9273

** Pontificia Universidad Javeriana. Correo: mnathalialamprea@javeriana.edu.co


Résumé

La question de la francophonie continue à faire l'objet de multiples débats, questions et discussions dans différents domaines : la géopolitique, la sociolinguistique, la littérature, la didactique des langues, parmi d'autres. Cette situation de multiplicité pose de problèmes au moment de l'enseignement de son histoire dans des domaines comme l'enseignement des langues et des cultures ou les études internationales. Dans cet article de réflexion, nous nous proposons de rentrer dans le sujet de la francophonie à partir d'un exercice de déconstruction et reconstruction critique de son histoire institutionnelle en ayant recours à des textes, des discours et des documents officiels. Cette approche nous permet de rendre compte non seulement de sa complexité à cause de ses liens idéologiques, politiques et économiques liés à la configuration d'une institution, mais aussi de ses tournants discursifs qui entremêlent des réalités et des positionnements divers. Pour ce faire, nous adoptons une approche généalogique et employons la catégorie de dispositif (Foucault, 1994 ; Deleuze, 1989), des outils qui nous aideront à (dé)(re) construire la configuration des sens communs concernant l'histoire de la francophonie pour ainsi viser à son enseignement depuis une perspective informée et critique.

Mots clés: francophonie; histoire; dispositif; discours; institution

Resumen

El tema de la francofonía sigue siendo objeto de numerosos debates, preguntas y discusiones en diferentes campos: la geopolítica, la sociolinguística, la literatura, la enseñanza de lenguas, entre otros, situación que plantea dificultades al momento de enseñar su historia en áreas como la didáctica de lenguas y culturas o los estudios internacionales. En el presente artículo reflexivo, proponemos volver al tema de la francofonía desde un ejercicio de deconstrucción y reconstrucción crítica de su historia institucional a partir de textos, discursos y documentos oficiales. Este enfoque permite tener en cuenta, no solo su complejidad por sus vínculos ideológicos, políticos y económicos, vinculados a la configuración de una institución, sino también sus giros discursivos que entremezclan diversas realidades y posiciones sobre el tema. Para ello, adopto un enfoque genealógico y empleo la categoría de dispositivo (Foucault, 1994; Deleuze, 1989), herramientas que me permitirán (de)(re)construir la configuración de sentidos comunes sobre la historia de la francofonía, y, en consecuencia, apuntar a su enseñanza desde una perspectiva actualizada y crítica.

Palabras clave: francofonía; historia; dispositivo; discursos; institución

Abstract

The notion of francophonie continues to be the subject of numerous debates, questions and discussions in various fields: geopolitics, sociolinguistics, literature, language teaching, among others. These multiple perspectives pose problems when it comes to teaching its history in areas such as languages and cultures teaching or international studies. In this reflective article, we propose to return to the subject of francophonie with an exercise of deconstruction and critical reconstruction of its institutional history using texts, speeches and official documents. This approach allows us to consider not only its complexity because of its ideological, political and economic links connected to the configuration of an institution, but also its discursive turns which intermingle various realities and positions. To do this, we adopt a genealogical approach and use the category of dispositive (Foucault, 1994; Deleuze, 1989), tools that will help us (de)(re)construct the configuration of common senses concerning the history of the francophonie, and then, to aim at its teaching from an informed and critical perspective.

Keywords: francophonie; history; apparatus/dispositive; discourses; institution

Introduction

Nous appartenons à des dispositifs, et agissons en eux. La nouveauté d'un dispositif par rapport aux précédents, nous l'appelons son actualité, notre actualité.

(Deleuze, 1988; Qu'est-ce qu'un dispositif? Magazine littéraire 257)

Ce sont déjà plus de 60 ans que la notion de francophonie continue à faire l'objet de multiples débats, questions et discussions dans différents domaines: la géopolitique, la sociolinguistique, la littérature, la didactique des langues, parmi d'autres. Si nous considérons la doxa de la notion, il est clair qu'une convention orthographique semble déjà être établie et acceptée pour la configurer à partir de deux acceptions et par conséquent, deux réalités différentes. D'un côté, la francophonie avec un « f » minuscule (ou petit f) faisant référence à l'ensemble des usagers du français (ou non)1 qui appartienent à des réalités sociolinguistiques diverses et dans lesquelles la langue française joue différents rôles (langue administrative, officielle, nationale, de partage). D'un autre côté, la deuxième acception (auto) dénommée Francophonie avec un « F » majuscule (ou grand f)2 faisant allusion au système politique inter-gouvernemental, c'est-à-dire à l'actuelle l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) instituée dans sa dernière version en 20 053. Cette distinction, d'emblée pratique et qui d'une certaine manière tranche les discussions sur le sujet, ne constitue qu'une convention qui ne fait pas forcément l'unanimité et ne suffit pas à rendre compte des écueils historiques ni de la réalité liée aux ambiguïtés idéologiques et politiques de son usage, ni des enjeux des groupes sociaux concernés.

Or, si nous nous concentrons par exemple sur le domaine de la didactique des langues ou les études internationales, le sujet de la francophonie semble être devenu une injonction présente dans des programmes et des méthodes d'enseignement et d'apprentissage, voire des ressources pédagogiques sans qu'on soit pour autant certain de son histoire, de ses contours et des raisons de son enseignement. Dans cet ordre d'idées, aborder la francophonie se traduit essentiellement dans l'enseignement de l'histoire d'une institution (I'OIF) qui a monopolisé le discours et le présente principalement dans une version promotionnelle (Spaëth, 2018) rendant ainsi invisibles la richesse du sujet et ses enjeux épistémologiques.

Avec cet article, nous cherchons donc à contribuer à la (dé)(re)construction analytique-critique de l'histoire de la francophonie à partir de la mise en dialogue de textes, discours et documents officiels, nous permettant de rendre compte non seulement de sa complexité à cause de ses liens idéologiques, politiques et économiques liés à la configuration d'une institution, mais aussi de ses tournants discursifs qui entremêlent des réalités et des positionnements divers. Pour ce faire, nous adoptons une approche généalogique et employons la catégorie de dispositif (Foucault, 1994; Deleuze, 1989) qui nous aidera à (dé)(re)construire la configuration des sens communs concernant l'histoire de la francophonie pour ainsi viser à son enseignement depuis une perspective informée et critique.

Or, avant de rentrer dans cette (dé)(re)construction historique, il est nécessaire de préciser la notion de dispositif sur laquelle nous nous appuyons. Foucault (1994) esquisse les principes de sa conception de dispositif en tant que «ensemble résolument hétérogène comportant des discours, des institutions, des aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques, [...] du dit aussi bien que du non-dit» (p. 299), alors que Deleuze (1989) la complète en soulignant que le dispositif est «un écheveau, un ensemble multilinéaire» composé de lignes de nature différente qui «suivent des directions, tracent des processus toujours en déséquilibre et tantôt se rapprochent, tantôt s'éloignent les unes des autres.» (185). Ces lignes sont alors des formes detre, d'habiter, de vivre.

En suivant Deleuze, il s'agit de quatre formes des lignes: lignes de lumière dont la fonction est d'«éclairer des objet préexistants» (p. 186) ; des lignes dénonciation qui «font parler» au moyen de la production d'un régime d'énoncés ; les lignes de force traversant les lignes de lumière et les lignes dénonciation et régulent les relations qui se produisent (correspond au pouvoir chez Foucault). Finalement, les lignes de subjectivation, dimension - introduite par Deleuze au modèle foucaldien du dispositif - qui fait référence à l'individu et se définit par «ses points de création et de déterritorialisation» (p. 186). Elles constituent des lignes de fuite qui configurent un jeu constant et inachevé de reprise, de modification, d'avortement et de reconceptualisation du dispositif : elles permettent de s'échapper aux lignes de force et consolider des ouvertures possibles et de nouveaux agencements.

Ainsi, si l'on comprend le dispositif régi par des formes hétérogènes interconnectées par un réseau multilinéaire, on pourrait affirmer que la notion de francophonie, entendue comme une multiplicité de discours, de sens, d'organisations, d'initiatives promotionnelles et de savoirs construits ici et ailleurs, de rapports, de pratiques, etc., constituerait effectivement un dispositif confectionné et idéologisé par des mouvances géopolitiques et économiques, mais qui pourrait être re-agencé dans le terrain du social et de l'éducation. Nous insistons sur le fait qu'une historisation analytique nous permettra d'évaluer son importance dans des domaines comme la didactique des langues ainsi que de fournir des soubassements épistémiques de ce «terrain de forces» toujours instable.

Les origines du terme: point de départ du dispositif francophone

Bien que la conception de la francophonie en tant que vecteur de la diversité culturelle et linguistique est d'une certaine manière, une confection récente, l'émergence du terme francophonie est plus ancienne. Selon Deniau (1983), Hagège (1987) et Tétu (1987), principaux concepteurs de l'histoire de lafrancophonie - dans la période de la consolidation du projet politique francophone lors du 1e sommet de la francophonie en 1986 -, c'est en effet lors de la période coloniale de la IIIe République, à la fin du XIXe siècle, que le mot a vu le jour vraisemblablement, sous la plume d'Onésime Reclus, géographe français attaché au développement de l'empire colonial français et à son intérêt expansionniste. Partant d'une approche géographique, historique et démographique, il introduit les termes francophone et francophonie4 dans son ouvrage France, Algérie et colonies (1886) pour envisager un inventaire des Français dans le monde ainsi que pour présenter la possibilité d'une expansion coloniale dans laquelle la langue française a clairement un rôle fondamental. De manière stratégique, dans le chapitre iv intitulé «La langue française en France, en Europe, dans le monde», Reclus présente les francophones de manière globale et pragmatique comme tous ceux qui partagent la langue française:

Voici quel est, non le nombre de gens parlant français, mais celui des hommes parmi lesquels le français règne, en dehors des millions dont il est la langue policée [...] Nous mettons aussi de côté quatre grands pays, le Sénégal, le Gabon, la Cochinchine, le Cambodge dont l'avenir au point de vue «francophone» est encore très douteux sauf peut-être pour le Sénégal. Par contre, nous acceptons comme francophones tous ceux qui sont ou semblent destinés à rester ou à devenir participants de notre langue, Bretons et Basques de France, Arabes et Berbères du Tell dont nous sommes déjà les maîtres. Toutefois nous n'englobons pas tous les Belges dans la «francophonie» bien que l'avenir des Flamingants soit vraisemblablement d'être un jour des Franquillons (Reclus, 1886, p. 422).

Si l'on comprend bien, dès le départ, l'idée d'un regroupement linguistique - innovante à l'époque et fondamentale pour la configuration du dispositif d'unité grâce à la langue - entraînait la distinction entre un centre français et une périphérie européenne et africaine, principalement. Il est donc clair que l'intérêt n'était pas un engagement pour l'union des pays ou pour l'avenir de la langue française dans un «amalgame» de peuples culturellement distants : cet intérêt ne répondait qu'à un projet colonial d'influence dans un contexte de concurrence expansionniste avec d'autres nations telles que l'Allemagne ou l'Angleterre. C'est en raison de cette concurrence d'ordre politique et à visée mondiale que Reclus signale le danger pour la France de continuer à s'affirmer comme la nation exceptionnelle :

Longtemps les Français ont eu la stupidité de se proclamer le premier peuple du monde. [...]. Ne caressons plus ces vains fantômes ! Paris n'est pas la cité mère, la ville antérieure, l'Alpha et l'Oméga, le commencement et la fin, le but des choses, la balance de justice et l'éternel flambeau la France n'est point le peuple-lumière, la sainte martyre, la race marquée, l'exemple du monde. (Reclus, 1886, p. 406)

Quels seraient alors, dans ce contexte, les moyens d'assurer le rayonnement mondial de la France en tant que puissance politique, économique et 'universelle' à l'époque ? Sans doute Reclus a-t-il bien compris qu'au-delà des considérations mercantilistes et commerciales, la langue se veut un moyen d'influence qui permettrait à la France de consolider sa présence, sa «mission civilisatrice» (Pinhas, 2004, p. 72) et, d'une certaine manière, démontrer sa puissance au niveau global. Dans cette optique, ses descriptions à caractère idéologique sur le «génie» de la langue française ne l'empêchent pas d'exposer, d'une part, son inquiétude concernant la situation du français dans le monde (la réduction de locuteurs de la langue) face à la menace qui représente l'anglais principalement, dans un jeu de forces ayant lieu à la fin du XIXe siècle :

Le français jouit encore de la prépondérance que lui firent, il y deux cents ans, la splendeur de la cour du Grand Roi, il y a cent ans l'esprit de ses écrivains; mais cette royauté touche visiblement à sa fin l'anglais passe au premier rang, et derrière l'anglais s'avancent le russe, l'espagnol, et même le portugais grâce au Brésil. Pour le moment le français règne encore comme lien de la société, langue du plaisir, du théâtre, de la politique. (Reclus, 1886, p.414)

D'autre part, il pose la nécessite d'assurer la pérennité de la langue à partir d'une approche expressément pragmatique au moyen de l'augmentation de «francophones», principalement en territoire africain :

Dans l'état présent, il faut au moins dix ans aux francophones pour augmenter de 2 millions 1/2. Comme la France est inféconde, que la Belgique et la Suisse n'ont plus de place pour les nouveaux venus, nous ne pouvons attendre un rang d'accroissement meilleur que de deux pays plus jeunes que le nôtre, l'Afrique du Nord, âgée de cinquante ans, et le Canada, qui n'a pas encore trois siècles. [...] il serait bon que la francophonie doublât ou triplât pendant que décupleront certaines hétéroglotties car l'humanité qui vient se souciera peu des beaux idiomes, des littératures superbes, des droits historiques elle n'aura d'attention que pour les langues très parlées, et par cela même très utiles. (Reclus, 1886, p.423-424).

Il ressort de ce qui vient d'être exposé que, premièrement, le projet ingénieux de la francophonie n'était guère la mise en valeur de la «diversité des peuples» ou des cultures - formation discursive du dispositif francophone renouvelé et élaboré dans son histoire officielle. En effet, ce projet met en relief le souci de Reclus d'avertir la France de sa perte d'influence internationale dans un contexte colonial. Dans cette logique, le géographe a bien compris que la langue était un outil essentiel dans une politique d'influence et de civilisation - voire de colonisation non seulement territoriale, mais aussi épistémique. Cela va de pair avec les arguments de supériorité de la France en tant que nation civilisatrice, de la politique d'assimilation coloniale qui opérait à l'époque - la fin du XIXe siècle - fondée sur l'idée de l'unification au moyen de la francisation (Girault, 1894), ainsi que de la «mystique universalisante de la Révolution Française de 1789» (Pinhas, 2004, p. 81). De ce point de vue, le tournant idéologique fondé sur la situation et le génie du français aboutit alors à la configuration d'une ambiguïté qui pose en premier plan l'avenir de la langue, la nécessité d'augmenter les locuteurs de la langue et de cette manière, assurer la présence et la puissance de l'empire français à l'échelle mondiale.

Or, ce projet politique basé sur l'accroissement linguistique dévoile ouvertement un deuxième élément dans une sorte de contradiction avec sa vision universalisante : la fonction pragmatique de la langue et sa fonction en tant qu'outil politique d'influence. Bien que Reclus fasse l'éloge de la suprématie du français en tant langue universelle au passé, il reconnaît que son universalité est depuis quelque temps partagée, voire dépassée par les stratégies d'influence d'autres empires (tel que l'empire britannique). D'où le fait que son but d'expansion linguistique pronostique, dès cette époque, la visée utilitariste des langues propre aux imaginaires actuels des langues en général, voire des politiques linguistiques des langues étrangères: «l'humanité qui vient se souciera peu des beaux idiomes, des littératures superbes, des droits historiques elle n'aura d'attention que pour les langues très parlées, et par cela même très utiles» (Reclus, 1886, p. 424).

Il est clair que la vision complexe et, à certains égards, lucide de Reclus à l'époque coloniale du XIXe siècle, a mis sur le tapis l'importance des langues et en particulier, de langue et de la culture françaises en tant qu'outils d'hégémonie, de pouvoir et surtout d'influence. Sa conviction - chez Reclus - de la valeur de la langue et de la culture françaises contribuera à fonder - dans le contexte postcolonial - l'argumentaire du français au service de la diplomatie d'influence en France, ainsi qu'à configurer le dispositif institutionnel et diplomatique axé stratégiquement sur le partage de la langue (aujourd'hui l'Organisation Internationale de la Francophonie).

C'est ainsi que pour l'élaboration du dispositif institutionnel de la francophonie, ayant besoin d'une histoire officielle pour être reconnu, deux Français (Xavier Deniau et Claude Hagège) et un Québécois (Michel Tétu), font renaître des cendres Onésime Reclus et lui attribuent le titre de forgeur des termes francophonie etfrancophone (Lavodrama, 2007). Ce mouvement stratégique pour son institutionnalisation ignore vraisemblablement d'autres voix présentes à l'époque comme celle du juriste et écrivain suisse Virgil Rossel (1858-1933). Avant de continuer, il nous semble important d'insister sur le fait que l'histoire officielle du dispositif francophone est élaborée par les trois concepteurs (Denieu, Hagège et Tétu), puisque ce sont justement eux qui, dans leurs ouvrages des années 80 (officialisation de l'association de pays ayant le français en tant que langue commune), reconstruisent le parcours de Reclus et le positionnent comme l'inventeur du néologisme «francophonie», même si son rôle en tant que «forgeur» de la francophonie peut se considérer exagéré.

Quant à Virgile Rossel, il pourrait aussi être considéré comme un autre pionnier de la notion de la francophonie, moins reconnu par l'histoire officielle postérieure mais encore présent dans le domaine de la littérature. Ce juriste, intéressé aussi par l'histoire littéraire, met en place l'idée de francophonie comme une catégorie qui engloberait les différentes littératures et cultures hors de l'Hexagone - principalement les littératures produites en territoire européen, à savoir en Belgique, en Suisse et au Canada - et place celles-ci à la hauteur des productions littéraires françaises. Rossel conceptualise les littératures non françaises qui partagent la charge symbolique d'une langue traversée par le prestige et l'idée puriste de 'perfection'. C'est ainsi que la notion de périphérie s'actualise d'ailleurs en contexte européen, étant donné que les écrivains européens non Français réclamaient aussi leur droit de visibilité face à l'hégémonie littéraire et linguistique de la France. Il met aussi en évidence leur situation en position d'infériorité au niveau symbolique et institutionnel:

Les écrivains se heurtent, dans des pays de territoire restreint et de faible population, à des obstacles presque insurmontables [...]. Condamnés à vivre sur une scène étroite, sans échappée sur l'étranger, et à s'adresser à des lecteurs clairsemés, ils sont placés dans des conditions très défavorables à la naissance d'œuvres fortes et de grandes œuvres. Ceux-là même qui se sentent supérieurement armés pour la gloire ne réussissent guère qu'en s'expatriant, ou qu'en exportant. Et puis, la littérature ne donne le pain quotidien à personne, en sorte que romanciers, critiques, poètes, doivent se résigner à n'être que des amateurs ; ils ne peuvent accorder à l'art que leurs loisirs, les moments perdus de l'administration, du barreau, du professorat, du journalisme. (Rossel, 1895, p.3-4)

La lecture de ces deux perspectives historiques concernant les origines naissantes du concept de la francophonie nous permet d'entrevoir la construction d'un dispositif de la langue française en tant qu'objet immatériel et patrimonial qui donnera lieu à un paradoxe : la langue comme un instrument de domination symbolique, comme un outil pragmatique de communication et politique d'influence et comme un projet de ralliement. Dans ce sens, les approches géographique, démographique et colonialiste chez Reclus et historique-littéraire chez Rossel font émerger une première image de la francophonie qui repose sur un double principe.

Le premier concerne le caractère 'supérieur' de la langue française représentant le raffinement, le purisme et l'essentialisme d'un système, qui cherche ainsi à «commander aux destinées des peuples colonisés, [...] ou à servir d'idéal d'expression et de trait d'union entre les usagers périphériques et la civilisation française» (Provenzano, 2006, p.7); en d'autres mots, une vision endogamique de la langue française présentée comme point de départ et point d'arrivée pour tous ceux ayant une relation avec le français (peuples colonisés, écrivains, historiens, apprenants, etc.). Le deuxième principe fait référence à l'idéal de rassemblement symbolique entre les locuteurs de la langue française pour conserver ledit essentialisme d'une langue sacrée (Provenzano, 2006) et garantir ainsi la stabilité du système: une «complicité» non accordée qui leur impose de «conserver intact le patrimoine de leur langue, à la conserver avec un soin méticuleux et jaloux» (Rossel, 1895, p. 8). Ni la variété ni la diversité d'aucune sorte ne seront reconnues dans ces premiers jalons du dispositif francophone ; au contraire, ce qui est privilégié est l'idée d'une francophonie universaliste, homogène et naturellement protectrice de son cheval de bataille: la langue française.

Résurrection du terme: institutionnalisation et idéologisation du dispositif

Si la période de la colonisation du XIXe siècle en situation de déclin hégémonique marque l'avènement du terme francophonie dans le cadre d'un pragmatisme colonial, c'est un autre moment historique de crise qui signe la réapparition du terme dans les années soixante, au lendemain des indépendances et au début de la période de la décolonisation. Selon les mots de François Hartog (2003), il s'agirait de deux régimes d'historicité différents, ce concept défini comme «outil heuristique, aidant à appréhender, non le temps ou le tout du temps, mais principalement des moments de crise du temps ici et là, quand viennent justement à perdre de leur évidence les articulations du passé, du présent et du futur» (p. 38). Ces deux régimes d'historicité seraient alors de moments de crise différents -de la France, principalement- qui déstabilisent et configurent de nouveaux rapports de la société avec le passé, le présent et le futur.

En effet, le mot francophonie ne réapparaîtra que dans les années soixante avec la parution, en 1962, du numéro 311 de la revue Esprit consacrée entièrement à la langue française. Dans cette publication, des personnalités reconnues dans les champs politique et culturel ont défendu la langue française et ont abordé les «possibilités d'action communes pour assurer le maintien et la croissance de la visibilité et du prestige internationaux du français» (Provenzano, 2006, p. 8). À partir de ce moment de la période post-coloniale, le dispositif francophone, déjà revêtu son pouvoir linguistique, prend un nouvel élan marqué par des réflexions intellectuelles à orientation politique. Ces actions communes qui auraient pour but de garantir l'avenir du français sont fondées à l'origine sur la représentativité de peuples culturellement divers regroupés par cette langue, dès lors visibles grâce justement aux mouvements de décolonisation.

Lors de cette époque post-coloniale, une première définition institutionnelle de la francophonie est énoncée sous la plume du poète, homme politique et premier président de la République du Sénégal fort attaché à une tradition française Léopold Sédar Senghor en 1962. De façon éloquente, il prolonge la tradition élogieuse des vertus de la langue française et conceptualise «l'Humanisme» français: «c'est cet Humanisme intégral qui se tisse autour de la terre, cette symbiose des énergies dormantes de tous les continents, de toutes les races, qui se réveillent à leur chaleur complémentaire» (Senghor, 1962, p. 844). Cette définition, fondée sur la philosophie de Teilhard de Chardin, comprend la langue française comme un tout universel, un trésor culturel commun qui permet de rassembler les cultures des territoires au-delà des frontières de la France «le français : Soleil qui brille hors de l'Hexagone» (Senghor, 1962, p. 844). Ainsi, sur un registre lyrique, Senghor insiste métaphoriquement sur la possibilité d'unifier les ex-colonies françaises autour d'un même axe qui réaffirme le socle du dispositif francophone: un système linguistique qui a dépassé les frontières de la France et est devenu une langue ouverte à différents peuples.

Cette vision métaphorique de la francophonie revêt à nos yeux une position premièrement idéaliste qui, en même temps, semble essentialiser l'hétérogénéité des sujets et nuancer les faits historiques, politiques et culturels de la langue française dans les différents «aires» dénommées francophones du siècle. Pour mieux distinguer ces aires, Combe (2010) fait la distinction entre le «Nord» ou le monde occidental et le «Sud» colonial et postcolonial. Dans le premier cas, la langue s'est développée librement comme en Belgique, au Luxembourg, voire au Québec (une colonie de peuplement); dans le deuxième cas, «la langue a été imposée par l'impérialisme colonial» (p. 8) dans des territoires comme les Antilles, l'Afrique et l'océan Indien, parmi d'autres. Évidemment, les histoires et les situations diffèrent diamétralement et par conséquent, le rapport des uns et des autres à l'égard de la langue et la culture française est radicalement différente: il ne s'agit pas toujours d'un rapport de gratitude, de respect ou de goût ; au contraire, il pourrait entraîner aussi des sentiments de douleur, de mépris, voire de lutte chez les concernés: des sentiments qui probablement participent aux enjeux des processus de construction identitaire.

Quoi qu'il en soit, l'ambitieux projet de francophonie défendu par Senghor met en évidence deux idées fondatrices de sa pensée: l'universalité de la langue française et son caractère fonctionnel pour les peuples africains. Quant au premier postulat, il fait écho à la dissertation de Rivarol de 1784 intitulé De l'universalité de la langue française et les qualités soulevées comme 'uniques' du français: sa capacité expressive, ses vertus linguistiques (prononciation, vocabulaire, syntaxe), sa clarté et grosso modo, son génie. Ces éléments propres à une idéologie linguistique du français seront étayés sur son expertise de la langue qui lui a accordé son statut d'homme de lettres et grammairien (Senghor a obtenu l'agrégation de grammaire en 1935). Notons au passage que cette conception puriste, voire magnifiée, de la langue repose sur un idéalisme des valeurs françaises et de la compréhension du projet francophone comme une «civilisation de symbiose universelle» (Senghor, 1986)5 ayant deux points de repère: d'une part la France et l'universalité de la pensée française ancrée sur de grands moments historiques comme le Siècle des Lumières, la Révolution Française, la Déclaration des droits de l'homme; d'autre part les mouvements de décolonisation et les peuples qui émergent comme des nations «indépendantes».

Ce postulat de l'universalité de la langue française est aussi partagé par Baggioni (1996) qui signale que le français en tant que bien culturel commun à des peuples constitue «une nécessité historique bien entendue, indépendamment des enjeux socio-économiques des différents peuples» (p. 800). Néanmoins, ce projet pose la question de la dissymétrie de représentativité et d'influence entre la France, pays reconnu dans le monde entier comme une grande puissance, et la position des anciennes colonies françaises traversant des processus de reconstruction interne et de quête identitaire. Cette remarque pourrait amener à reconsidérer la mise en œuvre du dispositif hétérogène de la francophonie comme une forme renouvelée de colonisation contemporaine où la langue est employée comme un objet symbolique de rassemblement entre communautés culturellement éloignées.

La deuxième idée de Senghor concerne le caractère pragmatique de la langue française face à la diversité linguistique des peuples africains. En effet, Senghor considérait que les langues africaines n'étaient pas si efficaces pour aborder la profondeur des questionnements philosophiques, abstraits et théoriques en général de sorte que le français s'avérait un outil systématique et opérationnel pour mener à bien de telles réflexions. Ce postulat pose en effet une double problématique: d'abord, celle de l'infériorité des langues locales dites minoritaires ou non-hégémoniques qui a pour résultat la construction d'imaginaires folklorisants des langues et des cultures africaines racialisées et associées «à l'émotion, au chant, aux intuitions, à la poésie» (Canut, 2010, p. 149). Par conséquent, un écho desdits imaginaires, qui contribuent à renforcer la dichotomie coloniale infériorité/supériorité linguistique, se transpose dans la conception des francophonies notamment africaines. Parallèlement, ces imaginaires folklorisants opposés à ceux des langues coloniales, hégémoniques, ou majoritaires comme le français, considérées comme les langues de la modernité, de la logique et de la connaissance, posent une frontière culturelle -et politique- qui élabore des rapports de force déséquilibrés et surdétermine la compréhension et les positionnements des sujets, leurs relations aux langues, aux territoires ainsi que leurs relations aux autres.

Or, en admettant que le français se veuille un véhicule de communication entre peuples africains, selon l'approche de Senghor, il est certain qu'il est devenu une des langues de l'éventail linguistique et culturel de ces peuples. À cet égard, la langue française n'est plus la même : elle accepterait alors d'être nourrie par d'autres langues car celles-ci contribuent à la diversification naturelle d'un objet langagier qui bouge constamment du fait de l'hétérogénéité de sujets qui la parlent, l'adaptent et se l'approprient librement. Pour autant, bien que Senghor ait reconnu cette réalité plurielle et l'importance des interactions entre les langues, son insistance sur la pureté de la langue et la nécessité de conserver le trésor commun «trouvé dans les décombres de la colonisation» - formule répétée par Senghor dans différents contextes - répondrait à une tension contradictoire entre l'unicité faussée de la langue et la pluralité constitutive d'une langue vivante et inachevée.

Une autre forme de relation avec la langue française, moins idéalisée et plutôt dialectique est aussi réclamée par des écrivains issus des espaces postcoloniaux. On trouve, par exemple, des écrivains algériens comme Yacine Kateb (1929-1982) pour qui la langue française est plus qu'un moyen qui cristallise son intérêt littéraire. Kateb - de la génération d'écrivains d'expression française avant l'indépendance algérienne en 1962 -, le français est d'abord un « butin de guerre» servant à son expression et à la réaffirmation de sa propre identité écrivaine, tandis que lafrancophonie en tant que dispositif institutionnel était pour lui une modalité de néocolonialisme. Il a déclaré à ce propos en 1966: «La francophonie est une machine politique néocoloniale, qui ne fait que perpétuer notre aliénation, mais l'usage de la langue française ne signifie pas qu'on soit l'agent d'une puissance étrangère, et j'écris en français pour dire aux Français que je ne suis pas français»6.

Cette posture clairement militante est tributaire du contexte socio-politique de l'époque: la fin de la guerre d'Algérie en 1962 avec les accords d'Évian et un processus de structuration nationale qui configure un positionnement idéologique marqué par le désir d'émancipation et la consolidation d'une littérature propre liée à une «conscience nationale» (Combe, 2010, p. 154).

Cet exemple - parmi beaucoup d'autres - met en évidence que le rapport avec la langue française est dialectique et va au-delà d'une considération nettement linguistique ou culturelle. Parler le français, l'utiliser et l'habiter peut devenir un sujet politique -collectif ou personnel- un champ de lutte qui sert, d'une part, à la dénonce, à la revendication de droits ou à la quête d'identité dite communautaire (non-fixe ni essentialisée); d'autre part, à l'expression individuelle des formes d'identification complexes qui se renouvèlent à chaque prise de parole.

En tout état de cause, les réflexions philosophiques de Senghor et son influence en tant qu'homme politique et défenseur fervent de la langue française ont contribué à la fabrication du dispositif francophone dans son versant d'association institutionnelle et bien évidemment, à la mise à jour historique dans la période de la décolonisation. Il s'agissait alors d'une sorte de Commonwealth francophone7 orienté par deux grands axes, à savoir le maintien de l'unité africaine et les liens privilégiés avec la France (Tétu, 1987). Dans cet ordre d'idées, il est évident que l'un des piliers historiques pour élaborer la genèse de la francophonie institutionnelle est l'interprétation fonctionnelle de Senghor concernant les résultats des processus de colonisation et de décolonisation et le rôle du français en tant qu'axe intégrateur des peuples. C'est ainsi qu'une volonté de rassemblement avec les ex-colonies s'institue autour de la langue française, ce qui marquera la configuration d'une nouvelle formation discursive (Foucault, 1969) du dispositif qui cherche à le rendre plus «inclusif», plus divers et à caractère universel. Pour Spaëth (2018), la volonté politique d'une organisation supranationale revêt une force pragmatique -quoique polémique-qui «lui permet d'asseoir la notion de francophonie dans le champ politique de la coopération et de la reconstruire intellectuellement, en tant que poète, dans un nouveau projet» (p.39).

Or, si nous partons de l'idée d'un dispositif politique intégrateur des peuples dits francophones en tant que rassemblement international fondé sur les bases d'une langue commune et de la pluralité culturelle, celui-ci n'accepterait pas l'utilisation du mot universalisme. En effet, un tel terme représente en soi une idée de norme et une approche essentialiste de la pluralité des langues et des cultures, ce qui est d'emblée contradictoire si l'on considère justement la diversité constitutive de vécus, les identités multiples, les relations interculturelles (Blanchet et Coste, 2010), les tensions socio-historiques et les particularités linguistiques et culturelles propres à chaque individu et à chaque groupe humain dénommé francophone. C'est pour cette raison que la conception initiale de la francophonie fait l'objet d'un détour discursif intégrateur et se renouvelle par celle de « dialogue des cultures » (Senghor, 1977, p. 844) : elle marque l'avenir de la deuxième période du mouvement francophone institutionnel dans les années 70 et 80 comme le signale Baggioni (1996, p. 801). Ce changement va de pair avec l'explicitation d'une dimension politique de coopération inter-gouvernementale épaulée évidemment par l'attachement à la langue française et le renforcement d'un discours convoitant en principe l'interaction entre peuples hétérogènes.

Avec Provenzano (2006), on peut considérer que l'expression institutionnelle du dispositif francophone vise la construction d'un «exotisme» auquel chaque peuple apporterait ses particularités afin de constituer un ensemble post-colonial porteur de culture et de 'pluralité' des territoires membres. C'est peut-être ainsi que l'on pourrait interpréter les propos du président français François Mitterrand lors du premier sommet de la francophonie institutionnelle en 1986, à Versailles :

Face à ces phénomènes [planétaires] [...] quel est le meilleur rempart ? C'est l'identité culturelle. [...] Et c'est pourquoi nous sommes là autour d'une langue, porteuse d'une culture qui elle-même, on peut le dire sans orgueil particulier, figure parmi les grandes civilisations de l'histoire. C'est une civilisation qui nous est commune, à laquelle chacun ajoute son propre apport. La plupart des cultures exprimées autour de la langue française sont des cultures mixtes ou multiples, elles s'enrichissent l'une par l'autre, mais le tronc central, l'axe-même de cette action, c'est le français. (O/F, 1986, p. 254)

Ainsi, ce qui s'énonce comme un projet dialogique de cultures diverses rassemblées par une même langue serait en réalité le début de possibles affrontements symboliques entre les états revêtus d'un statut hégémonique et ceux revendiquant une identité historique et culturelle propre. À ce sujet, Beniamino (1999) a signalé que la réunion des différentes «aires culturelles» conçues comme des «enjeux politico-idéologiques» (p. 66) pose le problème d'instaurer une idée d'homogénéisation des traits spécifiques propres des peuples et des individus fort hétérogènes comme le Québec, le Mali ou Haïti. De ce point de vue, selon l'auteur, les actions menées par les multiples territoires inscrits dans le cadre d'un « dialogue de cultures » doivent constituer des efforts en faveur de leur reconnaissance symbolique en tant que communautés singulières et autonomes, ayant un capital culturel, linguistique et anthropologique propre et divers.

Institutionnalisation politique du dispositif

La vision poétique et humaniste -pourtant fort pragmatique et normative- de la francophonie à laquelle exhorte Senghor se concrétise finalement en un projet politique inter-gouvernemental : l'expression institutionnelle du dispositif de la francophonie voit le jour. C'est ainsi que la francophonie commence son processus de visibilité internationale à travers la création de l'Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT), le 20 mars 1970, lors de la première conférence inter-gouvernementale réunie à Niamey, Niger. Cette date est particulièrement importante puisqu'elle a été choisie en 1988 pour fêter la journée internationale de la Francophonie, et à partir du 2010, celle de la langue française, ce qui a pour conséquence que la distinction entre une commémoration officielle et la célébration des communautés francophones en relation avec la langue soit floue.

En tout cas, l'institutionnalisation de cette date devient alors un élément essentiel dans la construction du dispositif de lafrancophonie dans son versant officiel (lié à l'institution) dans la mesure où elle se dote d'une célébration annuelle -comme expression de diversité culturelle et linguistique- et du français au mois de mars assurant ainsi sa visibilité et son maintien à l'échelle internationale, principalement dans des espaces éducatifs (d'enseignement de la langue). Or, le projet, signé par 21 pays et gouvernements à l'époque et supporté par les homologues de Senghor, le président tunisien Habib Bourguiba, le nigérien Haman Diori et le Prince cambodgien Norodom Sihanouk ne discute plus tant un idéal universel de rétablissement de droits et de partage humaniste ou culturel mais à sa place, un discours d'alliances politico-économiques encourageant ainsi des accords diplomatiques entre les pays membres.

Il est à signaler que le Canada a joué un rôle essentiel dans cet aménagement institutionnel du dispositif francophone (Spaëth, 2018) avec le soutien à la création d'une Agence de coopération culturelle et technique (aujourd'hui I'OIF). Ce rôle engagé est attribué au Québécois Jean-Marc Léger avec son article intitulé Une responsabilité commune publié dans le numéro célèbre de la revue Esprit de 1962. Dans son texte, Léger avance concrètement le projet d'une communauté internationale des peuples francophones sans même utiliser le mot francophonie: «il [y] fournit les linéaments d'une première histoire de la «communauté internationale des francophones», histoire institutionnelle inscrite dans la mondialisation des échanges et des premières organisations internationales» (Spaëth, 2018, p. 33). On voit alors que la langue française en tant qu'axe articulatoire du dispositif -ou plutôt, en tant que lien entre éléments hétérogènes (Foucault, 1994)- rassemble non seulement des cultures diverses : elle se présente de manière explicite comme le moyen symbolique qui permet de cristalliser des intérêts politiques visant en outre l'intégration aux dynamiques politico-économiques de la mondialisation de différents territoires comme le Canada et la France -et l'Afrique, avec la figure de Senghor- en pleine période de décolonisation. Il s'agit d'une avancée certes stratégique qui favorise graduellement les intérêts géopolitiques d'influence particulièrement de la France.

À ce propos, en ce qui concerne le rôle de la France dans la configuration institutionnelle du dispositif, il est important de signaler que bien qu'elle ne soit pas intervenue activement dans sa formation comme espace politico-économique dans les années 70 «afin d'éviter qu'elle soit accusée de néocolonialisme» (Cozma, 2012, p. 4), elle commence à y participer de manière plus engagée vers la fin des années 1990. Sa participation vise à atteindre deux grands objectifs de sa politique interne : renforcer le statut de la langue française dans le monde et bien évidemment, étendre son influence politique dans différents territoires, principalement en Afrique. À ce sujet, il n'est pas anodin que l'Afrique soit la cible du dispositif francophone ayant en tête la France (même si les secrétaires officielles proviennent d'autres territoires). Comme nous l'avons signalé, dès l'époque coloniale, l'expansion pragmatique du français proposée par Reclus a envisagé son avenir en territoire africain. Ceci s'est réaffirmé tout au long de l'histoire de lafrancophonie et encore aujourd'hui l'Afrique est considérée comme le principal moteur de la langue française (OIF, 2018), même si elle revêt de différents statuts (langue administrative, langue co-officielle, langue en cohabitation, etc.) dans des réalités linguistiques fort diverses.

Par ailleurs, à l'heure actuelle nous ne pouvons qu'observer les effets des intérêts de la France dans la configuration du pouvoir -voire de savoir-(Deleuze, 2003) du dispositif francophone à partir de différentes actions (cette configuration constituerait pour Deleuze les lignes de sédimentation du dispositif, à savoir les trois premières lignes du dispositif : de lumière, d'énonciation et de force). À titre d'exemple, nous en mentionnons deux : le financement de la plupart des activités de I'OIF et les actions du service fournies par les réseaux des Alliances Françaises et des Instituts Français dans le monde. Ceci pourrait être volontiers interprété comme la concrétisation d'une politique de diplomatie douce («soft power») qui cherche à consolider discrètement les lignes de force du dispositif à partir de la sublimation, «sous de nouveaux langages symboliques et culturels», [...] «d'une hégémonie française dont les ambitions matérielles - militaires et économiques - demeurent inchangées en Afrique» (Kisukidi, 2018). C'est ainsi que les tensions et les hésitations de la notion de francophonie en construction sont articulées par le dispositif avec des institutions politiques et culturelles qui orientent sa fonction stratégique dominante (Foucault, 1994).

Le tournant «diversitaire» du dispositif

L'idée de «dialogue de cultures» et de communauté plurielle de la deuxième période de la francophonie institutionnelle se concrétise de manière plus explicite à la fin des années 90 avec l'association du terme francophonie à la notion de diversité: une association qui n'est pas anodine. Il est possible de constater que le dispositif francophone se dote d'un discours de diversité grâce aux textes officiels de I'OIF qui instituent un tournant discursif ponctuel au sujet, plus précisément à partir de la déclaration du Sommet de Moncton en 19998:

La pluralité des langues et la diversité des cultures constituent des réalités qu'il faut valoriser. Dans cet esprit, nous devons continuer à soutenir la promotion et la diffusion de la langue française qui nous rassemble, comme celles des cultures et des langues partenaires qui font nos identités et la richesse de notre communauté. (OIF, 1999, p. 4)

Cette déclaration officielle explicite l'intérêt institutionnel à diffuser l'expression de la diversité culturelle et linguistique des peuples francophones au profit de la promotion de la langue française. Ce jeu stratégique pour assurer le maintien de la langue «en partage» sera d'ailleurs réaffirmé dans la déclaration du sommet de 2002 à Beyrouth :

Nous confirmons notre adhésion à la conception ouverte de la diversité culturelle [...]. Nous marquons notre attachement à la richesse des identités culturelles plurielles qui composent l'espace francophone et notre volonté de la préserver. [...]. Nous rappelons que la langue française, que nous avons en partage, constitue le lien fondateur de notre communauté et réaffirmons notre volonté d'unir nos efforts afin de promouvoir le plurilinguisme et d'assurer le statut, le rayonnement et la promotion du français comme grande langue de communication sur le plan international. (OIF, 2002, p. 6)

Observons que l'ouverture annoncée à la diversité culturelle et la promotion de la pluralité linguistique tournent autour de la centralité accordée à la langue française. En regardant de plus près, la promotion d'un plurilinguisme « abstrait » est opposée aux actions concrètes pour garantir le statut, le rayonnement et la promotion d'une langue reconnue de communication à l'échelle mondiale. Le dispositif institutionnel de la francophonie sert par ailleurs en tant que contrepoids à l'avancée de l'anglais comme langue internationale.

Finalement, consacrée dans la Charte de la Francophonie de 2005, la diversité linguistique et culturelle au bénéfice de la langue française (diverse aussi) se consolide comme l'un des piliers pour mener à bien des actions institutionnelles en matière politique et d'incidence planétaire :

La Francophonie [en tant qu'institution] doit tenir compte des mutations historiques et des grandes évolutions politiques, économiques, technologiques et culturelles qui marquent le XXIe siècle pour affirmer sa présence et son utilité dans un monde respectueux de la diversité culturelle et linguistique, dans lequel la langue française et les valeurs universelles se développent et contribuent à une action multilatérale originale et à la formation d'une communauté internationale solidaire. (Charte de la Francophonie,OIF, 2005, p. 3)

Ce tournant discursif nous permet de retenir une logique qui semble incohérente, à savoir la vision diversitaire et pluraliste qui s'énonce face à la notion de valeurs universelles. En effet, délimiter les valeurs à une propriété d'universelle actualise une certaine uniformisation qui négligerait les particularités culturelles que l'institution même paraît revendiquer. Cette contradiction remettrait en question la volonté de celle-ci de s'engager dans des processus de visibilisation de la diversité des peuples.

Il est à signaler que pour arriver à l'idée de diversité, la dimension institutionnelle du dispositif francophone est passée par différentes étapes et des glissements discursifs visant vraisemblablement à nuancer la charge idéologique et l'image dominante d'une association néocoloniale. Dans cette logique, et d'un point de vue français, la francophonie institutionnelle se voulait premièrement un rassemblement post-colonial autour de la langue française, puis un dispositif politique d'alliances diplomatiques et progressivement, elle s'annonce comme un projet qui proclame la diversité linguistico-culturelle des peuples comme le résultat de la création d'un ensemble intergouvernemental9. Ce changement discursif prônant une francophonie diverse a immanquablement renforcé la confusion entre la dimension institutionnelle du dispositif et la dimension de communauté linguistique-culturelle (réelle et imagée) du français qui sert d'une part à l'idéologisation de la francophonie et d'autre part à l'atténuation discursive des politiques d'influence. À ce sujet, Premat (2018) avance que :

le syncrétisme des deux notions [institutionnelle et communautaire] crée un effet de confusion favorable à la diffusion d'une idéologie de la francophonie selon laquelle cette organisation serait le bien commun des populations et des gouvernements francophones au service d'une forme de cosmopolitisme véhiculée par la langue française, (p. 3)

Or, tantôt pour la configuration institutionnelle du dispositif, tantôt dans une perspective plus large, il devient évident que la notion de diversité s'avère toujours un jeu acrobatique de grands écarts qui repose sur un paradoxe: l'universalité de la langue française et la diversité linguistique et culturelle des peuples qui constituent l'espace dit francophone. Force est d'admettre que l'équilibre est difficile à atteindre étant donné la complexité des réalités et des phénomènes socio-culturels marqués par l'instabilité, la pluralité et le dynamisme des territoires et des peuples.

Conclusions

Notre intérêt de (dé)(re)construire l'histoire de la francophonie de manière analytique nous a amenée à fouiller les parcours à travers lesquels cette notion s'est élaborée et s'est constituée comme un dispositif hétérogène constitué de discours, de rhétoriques et de pratiques à dévoiler (Foucault, 1994; Deleuze, 1989). Nous pouvons ainsi dire que la francophonie constitue un ensemble marqué par une forte institutionnalisation et un aménagement idéologique tendant à mêler deux grands discours de base: celui de l'institution en tant que rassemblement géopolitique avec celui de la pluralité linguistique-culturelle, sans oublier non plus la complexité inhérente associée à la langue française en relation avec ses réalités socio-culturelles hétérogènes.

De manière générale, nous pouvons aussi signaler que la francophonie, entendue comme un dispositif hétérogène et multilinéaire -dont les lignes font l'objet de dérivations de différent ordre (Deleuze, 1989)-, actualise ses lignes de sédimentation de pouvoir et de savoir au moyen de sa figure de l'institution. C'est principalement son versant institutionnel qui élabore, gère et met à jour son histoire et ses configurations discursives -progressives et contradictoires- rendant visible la francophonie en tant que réalité, ensemble et partage.

De cette manière, le dispositif francophone dans sa dimension institutionnelle se réaffirme stratégiquement sur le plan politique et économique avec la France en tête de ses relations, tandis que sur le plan culturel et éducatif, le centre d'intérêt se focalise sur les pays dénommés francophones - hors France. De ce point de vue, ce qui s'énonce comme pluriel et ouvert actualise -parmi d'autres- la dichotomie des notions centre et périphérie rendant ainsi compte des positionnements idéologiques qui se construisent, se combinent et se juxtaposent non seulement dans la configuration sociopolitique du dispositif francophone, mais aussi dans les discours de l'enseignement de son histoire et ses contours.

Pour autant, nous considérons que cette tentative du dévoilement du dispositif de la francophonie à partir de son historisation analytique et du retour à la configuration de ses sens communs, nous permet non seulement de comprendre ses tensions, ses discours et ses pratiques discursives, mais aussi, de réfléchir à des possibilités pour concevoir des formes de reterritorialisation du concept (les lignes de subjectivation selon Deleuze), c'est-à-dire de nouveaux agencements discursifs et pratiques visant son enseignement dans des domaines tels que les langues et les cultures et les études internationales. Ainsi, à notre avis, cette première étape de (dé)(re) construction analytique de son histoire - objectif de notre article - est essentielle pour tenter ensuite de matérialiser des lignes de subjectivation qui, à nos yeux, se produisent par la mise en œuvre d'une deuxième historisation: une historisation construite à partir des vécus et des mémoires des communautés dites francophones. Si c'est ainsi, ce projet d'historisation d'une francophonie renouvelée est ancré dans le constat de l'hétérogénéité de réalités, de subjectivités, de savoirs, d'histoires et de pratiques des peuples qui partagent la langue française, de sorte que son enseignement pourrait permettre de contraster son versant officiel avec les réalités vécues par ces sujets dénommés francophones. Il est clair que la francophonie a une histoire officielle et institutionnalisée: il reste à élaborer ses mémoires.

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* Cet article dérive de ma thèse de doctorat intitulée: Pour une compréhension de la question de la francophonie: configurations sémantiques et discursives du concept en contexte pédagogique colombien.

1Un grand nombre de personnes issues de certains territoires dénommés «francophones» ne parlent pas forcément français : cette langue a un statut de langue administrative ou officielle.

2Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Récupéré le 13 février 2021 du site de I'OIF: http://www.francophonie.org/-Qu-est-ce-que-la-Francophonie-.html.

3La francophonie en tant qu'organisation internationale se fonde en 1970 sous le nom d'Agence de Coopération Culturelle et Technique (AOUT). En 1998 elle adopte le nom d'Organisation Internationale de la Francophonie qui s'instaure finalement comme seule appellation en 2005, l'instauration avec la Charte de la Francophonie.

4Dans cet ouvrage, le mot francophones a sept (7) occurrences, alors que francophonie n'en a que deux (2): la première entre guillemets alors que la deuxième n'en a plus. Dans un ouvrage postérieur intitulé Le plus beau royaume sous le ciel de 1889, la fréquence du mot francophonie est plus élevée.

5 Colloque des Cent, 15 février 1986, «L'Arbre à palabre des Francophones».

7Tout en gardant les distances avec le Commonwealth britannique, lequel dévoile explicitement ses orientations politiques et économiques.

8II est à signaler que cette référence à la diversité culture est présente dès le début, pourtant c'est à partir du Sommet de Moncton que la diversité culturelle et linguistique des peuples dits francophones s'est instaurée comme choix stratégique pour l'avenir de la langue française.

9Cela pourrait se traduire, par exemple, dans la création et le financement de I'UIF pour la mise en place de programmes et de politiques linguistiques qui reposent sur le multilinguisme où les langues nationales africaines et le français sont enseignés dans les différents pays en Afrique francophone. Source: Site officiel Organisation Internationale de la Francophonie: www.francophonie.org

Para citar este artículo Lamprea-Abril, N. (2022). Une histoire à enseigner? Tentative d'une déconstruction et reconstruction de l'histoire de la francophonie. Folios, (56). https://doi.org/10.17227/folios.56-13527

Received: March 15, 2021; Accepted: October 04, 2021

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