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Avances en Psicología Latinoamericana

Print version ISSN 1794-4724On-line version ISSN 2145-4515

Av. Psicol. Latinoam. vol.28 no.2 Bogotá July/Dec. 2010

 

Impact de la violence politique sur la santé mentale des jeunes adolescents en Colombie. Analyse des facteurs de risque et de protection

Impact of the political violence on mental health of young adolescents in Colombia. Analysis of risk and protective factors

Clette Sabatier*
Jorge Enrique Palacio Sañudo**
Michel Tousignant***

* Université Victor Segalen, Bordeaux – France. E-mail: colette.sabatier@u-bordeaux2.fr.

** Universidad del Norte - Barranquilla – Colombie. E-mail: jpalacio@uninorte.edu.co.

*** Université du Québec à Montréal – Canada. E-mail: tousignant.michel@uqam.ca

Fecha de recepción: 11 de noviembre de 2009
Fecha de aceptación: 22 de marzo de 2010


Abstract

The aim of this research is to examine the mental health of young adolescents who have been displaced by political violence of Colombia within the integrated ecological model of trauma impact presented by Elbedour, ten Bensel and Bastien (1993). This framework stipulates the combined influence of several levels of factors linked to family affiliation and social aspects of family network. Two groups of young adolescents participated in this study, 48 were displaced by political violence (26 boys and 22 girls), 50 sedentary adolescents lived in extremely poor suburb of Barranquilla (26 boys and 24 girls). The mean age is 12.5 years old (sd= 2.18; min = 9; max = 16). Questionnaires have been chosen with regards to their use in a context of poverty and/or violence (Macksoud, 1992; Macksoud& Aber, 1996; Macksoud, Aber, Dyregrov, & Raundalen, 1990). Results show that displaced adolescents are more depressed and anxious than their sedentary peers. Anxiety is explained by the total indices of trauma events while depression is rather explained by the separation from parents. Social competencies and social environment appear as protective factors. Among the social factors, one finds the extended family unit and the inclusion of friends within the social network of the family. Overall, the family and the preservation of the family unit appear as crucial factors of mental health.

Keywords: political violence, displaced person, mental health, adolescents, Colombia.

Resumen

El objetivo de esta investigación es examinar desde una perspectiva ecológica la salud mental de los adolescentes desplazados por la violencia política en Colombia. Se tomó como base el modelo ecológico integrado del impacto del trauma de Elbedour, ten Bensel y Bastien (1993), que estipula la influencia combinada de diferentes niveles de factores unidos a la experiencia traumática, factores individuales y factores proximales que vienen de la familia, y de los factores sociales de la red social familiar. El estudio se realizó con 98 jóvenes en edades entre los 9 a 16 años (M= 12.5 años, dt= 2.18), habitantes de las afueras de Barranquilla, de los cuales 48 son desplazados por la violencia (26 de sexo masculino, 22 de sexo femenino) y 50 son sedentarios pobres (26 de sexo masculino, 24 de sexo femenino). Los cuestionarios se escogieron en función de su utilización en contextos de pobreza y/o violencia (Macksoud, 1992; Macksoud & Aber, 1996; Macksoud, Aber, Dyregrov & Raundalen, 1990). Los resultados muestran que los adolescentes desplazados son más deprimidos y ansiosos que sus pares sedentarios. La ansiedad está unida al número total de eventos traumáticos, mientras que la depresión se explica más bien por la separación de los padres. Las competencias sociales y el ambiente social actúan como factores protectores. Entre los factores del ambiente social se observa el hecho de vivir en una familia extensa y de inscribirse en una red social que incluye a los amigos de la familia. En su conjunto, la familia y la preservación de su unidad aparecen como elementos cruciales.

Palabras clave: violencia política, desplazados, salud mental, adolescentes, Colombia.

Résumé

L’objectif de cette recherche est d’examiner dans une perspective écologique la santé mentale des jeunes adolescents déplacés du fait de la violence politique à l’intérieur de la Colombie en adoptant le modèle écologique intégré de l’impact du trauma d’Elbedour, ten Bensel et Bastien (1993). Ce modèle stipule l’influence combinée de plusieurs niveaux de facteurs reliés à l’expérience traumatique, les facteurs individuels et les facteurs sociaux proximaux venant de la famille et les facteurs sociaux du réseau social de la famille. L’étude a porté sur 98 jeunes adolescents âgés de 9 à 16 ans, (M=12,5 ans, e-t= 2,18) vivant dans la banlieue de Barranquilla dont 48 sont des déplacés intérieur (26 garçons, 22 filles) et 50 sont des sédentaires pauvres (26 garçons, 24 filles). Les questionnaires ont été choisis en fonction de leur utilisation dans des contextes de pauvreté et/ou de violence (Macksoud, 1992; Macksoud & Aber, 1996; Macksoud, Aber, Dyregrov & Raundalen, 1990). Les résultats montrent que les adolescents déplacés sont plus déprimés et anxieux que leurs pairs sédentaires. L’anxiété est reliée au nombre total d’événements traumatiques tandis que la dépression s’explique plutôt par la séparation des parents. Les compétences sociales et l’environnement social agissent comme facteurs protecteurs. Parmi les facteurs de l’environnement social on observe le fait de vivre dans une unité domestique étendue et d’être inscrit dans un réseau social comprenant des amis de la famille. Dans l’ensemble, la famille et la préservation de son unité apparaissent des éléments cruciaux.

Mots clés: violence politique, déplacées, santé mentale, adolescents, Colombie.


Introduction

En la Colombie, la violence politique persiste depuis d’innombrables années en raison de l’implication de belligérants aux causes multiformes, tels les guérilleros d’extrême-gauche, les paramilitaires d’extrême-droite, les trafiquants de drogue. Cette violence atteint au quotidien des pans entiers de la population. Environ 3,9 millions de personnes (dont 40% de moins de 17 ans) auraient été déplacées, entre 1985 et 2009, par la violence politique, dont 390 000 personnes pour la seule année 2008, de très nombreux villages auraient été détruits par les combats entre les groupes armés (Acción Social, 2009). Bien que les origines et les conséquences sociologiques et économiques du déplacement forcé ainsi que les effets des programmes d’aide sociale aux familles déplacées soient étudiées (Bello, Martín, & Arias, 2002; Lidchi, Tombs, Magalhaes, & Lopez, 2004), les recherches rigoureuses examinant les conséquences psychologiques sur les populations déplacées sont plutôt rares particulièrement avec des enfants et des adolescents. Deux recherches, l’une avec des adolescents âgés en moyenne de quinze ans, l’autre avec des enfants entre dix et douze ans soulignent l’effet délétère auprès de la population colombienne ordinaire de cette violence politique généralisée, la proximité avec la violence augmentant l’anxiété et la justification de la violence (Kliewer, Murrelle, Mejia, Torres de G., & Angold, 2001; Sadlier, 1997). Les problèmes rencontrés par les familles et enfants déplacés installés provisoirement ou définitivement sont, évidement, plus importants, ces familles et enfants sont plus anxieux et plus déprimés que les familles et enfants sédentaires vivant dans des conditions socioéconomiques comparables (Abello, Amar, Botto, Carrillo, Linares, & Racedo, 2001; Palacio & Sabatier, 2002; Sabatier, Palacio, Namane, & Collette, 2001; Sistiva-Castro & Sabatier, 2005).

L’objectif de cette recherche est d’examiner la santé mentale des jeunes adolescents déplacés du fait de la violence politique à l’intérieur de la Colombie, ses facteurs précipitants et de protection en adoptant le modèle de l’écologie sociale préconisée par Bronfenbrenner (1979) revu et ajusté à la problématique des populations victimes des conflits armés par Elbedour, ten Bensel et Bastien (1993) en les comparant avec des pairs sédentaires vivant dans des conditions socioéconomiques comparables.

Conséquences psychologiques de la violence: quels modèles

Les conséquences psychologiques dévastatrices sur les enfants et les adolescents de la guerre et de la violence politique sont connues depuis longtemps, pourtant les études systématiques sur les conséquences de différents types de conflits (guerre, terrorisme, conflits politiques intérieurs) ne datent que des années 90, les grands oubliés restent les conflits intérieurs n’impliquant pas de conséquences internationales économiques ou politiques (Iszatt & Price, 1995; Jensen & Shaw, 1993; Keilson, 1998; McCallin, 1991; Shaw, 2003). La prévalence estimée varie de 10 à 90% selon les populations cliniques et les situations de conflit (Shaw, 2003). La symptomatologie observée chez les enfants dans les camps de réfugiés ou ayant vécu la guerre est variée, on retrouve des plaintes somatiques, des troubles de la vigilance (sommeil, concentration), des cauchemars, de la dépression, des troubles de la conduite, des troubles cognitifs et une altération du sens moral (Leyens & Mahjoub, 1994; Shaw, 2003).

Le modèle du stress post-traumatique est le modèle le plus répandu pour étudier les réactions des enfants à la violence politique. Dans cette approche, les chercheurs tâchent d’identifier les réactions psychologiques des enfants consécutivement à des événements traumatiques qui seraient circonscrits et répertoriés. Cette perspective a produit des données intéressantes et utiles pour la compréhension de l’enfant dans des situations de violence (Khamis, 2005; Thabet & Vostanis, 2000). Cependant par sa centration explicite sur des événements circonscrits et selon une symptomatologie très précise, elle ne s’avère pas satisfaisante ni sur le plan clinique ni sur le plan du développement de l’enfant (Ehrensaft, Kapur, & Tousignant, 1999). Les critiques de cette approche avec la population des enfants victimes de la violence politique portent non seulement sur les définitions de l’événement traumatique, et la précision des symptomatologies observées, mais également sur l’étroitesse du modèle au regard de l’ampleur des difficultés reliées aux climats de violence politique qui se sont enkystés dans les sociétés.

L’approche strictement centrée sur l’identification des événements stressants, ne prend pas en compte la réalité multiforme et chronique des situations de violence politique qui a des effets plus généraux sur le bien-être des individus avec comme conséquence majeure l’augmentation de la pauvreté du pays en général et plus particulièrement de la population soumise à ce type de violence. La plupart des populations qui ont eu à subir de la violence politique se retrouvent dans des conditions de vie précaires, souvent peu sûres avec la menace permanente d’un nouveau conflit ou d’une nouvelle situation stressante, identique ou différente. Les conséquences en chaîne de la violence politique peuvent être aussi dévastatrices que la violence elle-même. De ce fait, l’atteinte à la santé mentale et la symptomatologie reliée aux événements de la guerre sont beaucoup plus larges (Al-Eissa, 1995; Berman, 2001).

Une approche plus globale de la santé mentale, de l’enfant et de l’environnement reposant sur des indices élargis de la personnalité et de la santé mentale et une prise en compte du contexte de la violence et des conditions de vie actuelle des individus s’avère nécessaire. De nombreux auteurs recommandent une approche écologique qui prenne en compte différents niveaux de variables et leurs interactions (Berman, 2001; Boothy, 1992; Brajsa- Zganec, 2005; Farwell & Cole, 2001; Garbarino & Kostelny, 1996; Jensen & Shaw, 1993; McCallin, 1991; Smith, Perrin, Yule, & Rabe-Hesketh, 2001). Dans cette recherche, nous avons adopté le modèle écologique intégré de l’impact du trauma d’Elbedour, ten Bensel et Bastien (1993) repris par Walton, Nuttal et Vasquez (1997) et Betancourt (2005) qui stipule l’influence combinée de plusieurs niveaux de facteurs dont l’influence du contexte de la violence et du lieu de vie à l’issue de la violence, l’influence de la culture et des solidarités de réseau et la cohésion communautaire en plus des facteurs individuels (âge, sexe, facteurs de personnalité) et des facteurs de risque liées à l’expérience d’événements traumatiques selon le modèle écologique des risques et des protections.

Nos recherches antérieures (Palacio & Sabatier, 2002; Sistiva-Castro & Sabatier, 2005) nous permettant de penser que les événements traumatisants reliés à la violence politique dont le déplacement forcé et précipité, sont au coeur de la problématique des jeunes adolescents et de leurs familles, nous avons adopté la version modifiée du modèle d’Elbedour et al. (1993) par Walton et al. (1997) en intégrant mieux les connaissances issues du modèle du stress-post-traumatique, à savoir le repérage des événements de vie, les réactions traumatiques (reviviscence, évitement et hyperexcitation) et les connaissances issues du modèle écologique de la violence incluant l’ontosystème c’est à dire les caractéristiques personnelles des individus et leur trait de personnalité. Ainsi, dans notre modèle, nous proposons, en premier lieu, de repérer parmi les événements spécifiques reliés à la violence politique ceux qui atteignent le plus les enfants et d’en analyser leurs conséquences sur la santé mentale des jeunes adolescents, et, en second lieu, de comprendre l’interaction des facteurs reliés à la personne et les facteurs reliés aux différents paliers de l’environnement social, proximal par la famille, distal par le réseau social et par les conditions de vie.

Avant de présenter la recherche, nous présenterons les connaissances reliées à chacun des quatre paliers principaux de ce modèle, à savoir 1) les événements traumatiques et leurs conséquences sur les enfants, 2) les variables personnelles, telles l’âge, le sexe d’une part et les variables de la personnalité ou les compétences sociales d’autre part, nous distinguerons ces deux niveaux, 3) les variables reliées à l’environnement proximal telles la famille, et 4) les variables reliées à l’environnement social plus distal, telles le réseau et le soutien social des familles d’une part, et de façon plus éloignée encore, les contextes de relocalisation et les climats sociaux qui prévalent dans les zones de relocalisation, d’autre part, ces deux niveaux seront distingués.

Les éléments du modèle écologique des conséquences de la violence politique

Evénements stressants et leurs conséquences sur les enfants

Les événements reliés à la violence politique sont nombreux et varient en nature, en fréquence et en intensité selon les techniques de combat et d’intimidation utilisées (terreur et menaces de mort, bombardements, incendies, pillages). Cependant, dans la plupart de ces conflits, les enfants rencontrent des événements additionnels à ceux directement reliés au combat. Les plus fréquents sont la séparation des parents, ainsi que la perte de l’environnement social et institutionnel habituel dont le plus souvent le déplacement et la perte de personnes proches, membres de la famille ou amis (Boothy, 1992; Macksoud & Aber, 1996; Kuterovac, Dyregrov, & Stuvland, 1994; Paardekooper, de Jong, & Hermanns, 1999). Ces derniers événements de nature sociale peuvent avoir des effets dévastateurs plus durables que les premiers inhérents aux techniques de combat.

Contrairement à certaines études qui montrent qu’en soi l’accumulation du nombre d’événements différents, leur intensité et leur durée, sont les indices explicatifs sans que des liens spécifiques entre des troubles spécifiques et des types d’événements particuliers puissent être identifiés (Shaw, 2003), Kuterovac, Dyregrov, et Stuvland, (1994) ainsi que Macksoud et Aber (1996) observent des effets spécifiques des événements traumatiques selon qu’ils soient de nature sociale ou inhérents aux techniques de combat. Ainsi, la séparation des parents et le déplacement, qui impliquent un changement d’école voire l’impossibilité d’aller à l’école et le changement de tout l’environnement social, sont corrélés plus fortement que les autres événements avec la dépression alors que les bombardements et l’assistance à des actes violents sur des personnes proches sont plutôt reliés au stress post-traumatique et à l’anxiété.

Age et sexe

L’âge et le sexe sont deux caractéristiques personnelles qui font varier chez les enfants à la fois leur exposition aux événements traumatiques et leur réponse à ces événements et à l’environnement (Berman, 2001). Les auteurs décrivent des transformations reliées au développement à la fois pour l’expression de la symptomatologie et pour leur capacité de saisir leur monde social et les enjeux de la violence politique. La symptomatologie la plus fréquente chez les adolescents entre 11 et 14 ans, sont une faible concentration, des problèmes de sommeil, un mal-être, un retrait, des cauchemars. Au cours de la période scolaire (de 6 à 12 ans), les capacités cognitives permettant de comprendre les enjeux dramatiques de la situation se mettent en place. Les enfants apprennent ainsi à se protéger et à développer des moyens de faire face au stress, notamment en étant plus actifs et prenant des responsabilités au sein de la famille ou de la communauté. Ainsi on observerait une certaine diminution entre dix-douze ans et l’adolescence des réactions psychologiques à la violence (Stein, Mendelsohn, Moosa, & Tudin, 1996). Les recherches ayant évalué les enfants et les adolescents d’âge différents en deux temps parfois espacés d’un an montrant une certaine persistance des troubles émotionnels avec le temps écoulé, il semble bien que la maturité cognitive et sociale reliée à l’âge au moment où les faits se sont déroulés soit un facteur explicatif en soi (Ajdukovic & Ajdukovic, 1998; Garbarino & Kostelny, 1996; Stein, Comer, Gardner, & Kelleher, 1999; Thabet & Vostanis, 2000).

Les différences reliées au sexe varient selon les aspects comportementaux et affectifs étudiés. Lorsque l’évaluation porte sur le stress post-traumatique, la dépression ou l’anxiété, les filles apparaissent plus atteintes par la violence politique que les garçons (Brajsa-Zganec, 2005; Ronen, Rahav, & Rosenbaum, 2003; Stein, Comer, Gardner, & Kelleher, 1999). Elles sont plus stressées, plus anxieuses et plus déprimées. Mais dès lors que les mesures incluent des dimensions externalisées ou adaptatives (relation sociales avec la famille, et avec les pairs; adaptation scolaire), les garçons rencontrent sur ces dimensions, plus de difficultés que les filles (Amone-P’Olak, Garnefski, & Kraaij, 2007; Garbarino & Kostelny, 1996; Vizek-Vidovic, Kuterovac-Jagodic, & Arambasic, 2000). Certaines recherches montrent une accentuation de ces différences avec l’âge (Garbarino & Kostelny, 1996; Vizek-Vidovic, et al., 2000).

L’exposition aux événements traumatiques diffère selon le sexe et l’âge. Dans certaines circonstances, les filles et les enfants jeunes seraient plus protégés par les familles qui les éloignent assez rapidement du lieu du conflit. Tandis que les garçons à partir de dix ans sont plus exposés aux événements de violence, soit parce qu’ils sont plus actifs et tentent de prendre part à l’activité reliée à la violence, soit parce qu’on compte sur eux ou qu’on pense moins à les protéger (Garbarino & Kostelny, 1996; Macksoud & Aber, 1996; Punamäki & Puhakka, 1997). Mais il arrive fréquemment que les jeunes filles pubères ou pré-pubères ne puissent être protégées et deviennent victimes d’abus sexuel. Dans de nombreux conflits armés, l’abus sexuel est utilisé comme une arme de guerre volontairement dégradante (Dupierreux, 2008; Josse & Dubois, 2009).

Le sexe et l’âge modifient la sensibilité aux facteurs de risque. Les enfants plus jeunes sont plus vulnérables au stress que les enfants plus âgés, et les garçons plus que les filles. Les corrélations entre les facteurs de risque et les problèmes rencontrés sont plus élevées chez les garçons que chez les filles, même si celles-ci annoncent un plus haut taux de difficultés (Brajsa-Zganec, 2005; Garbarino & Kostelny, 1996; Ronen et al., 2003). Il semble toutefois que cela ne soit pas toujours le cas, Miller (1996) note que chez les Guatémaltèques vivant en camp de réfugiés, ce sont plutôt les filles qui seraient les plus vulnérables, elles sont plus sensibles aux réactions dépressives de leur mère qui ont peut-être fait l’objet d’abus sexuel ou vivent avec la menace de l’être.

Variables de la personnalité

Les caractéristiques de la personnalité et les capacités des enfants et des adolescents de faire face aux situations stressantes et à se débrouiller dans des environnements hostiles apparaissent comme des facteurs qui viennent atténuer les réactions émotionnelles et comportementales. Les enfants et les adolescents les plus autonomes, les plus débrouillards, qui arrivent à mieux réguler leurs émotions ou font preuve de flexibilité mentale font mieux face au stress (Amone-P’olak, et al., 2007; Kocijan-Hercigonja, Rijavec, Marusic, & Hercigonja, 1998; Qouta, El-Sarraj, & Punamäki, 2001; Walton et al., 1997). Ces caractéristiques ne sont pas des traits innés, elles sont acquises avec la maturité et varient selon le type de stress rencontré et la situation après le combat (Punamäki, Muhammed, & Abdulrahman, 2004). On note que les enfants ayant été soumis à des stress développent des stratégies adaptatives plus élevées et plus nombreuses avec des mécanismes d’autoprotection et des styles cognitifs qui permettent un fonctionnement effectif (Jensen & Shaw, 1993, Paardekooper, et al., 1999) mais lorsque le stress et le conflit sont intenses, on assiste à une diminution importante de ces stratégies et à leur inefficacité (Kocijan-Hercigonja et al., 1999).

Le rôle des parents

Les parents sont les principaux protecteurs des enfants dans les situations de conflits politiques. Ils sont les personnes les plus efficaces pour leur procurer un sentiment de sécurité. Les études sur les conséquences de la seconde guerre mondiale ont souligné l’importance des conditions de la séparation (urgence, anxiété, absence de dialogue) et la réaction émotionnelle des parents sur les réactions des enfants aux événements stressants liés à la guerre (bombardement, actes de violence, etc.) (Baddoura, 1998; Leyens & Mahjoud, 1994). Les recherches actuelles soulignent l’importance de la présence maternelle, de ses réactions au stress et de sa capacité à être attentive aux besoins de l’enfant. La perception du soutien des parents, et la cohésion familiale modèrent l’impact des événements de guerre sur la santé mentale des enfants et des adolescents plus que n’importe quelle autre source de soutien quel que soit l’âge de l’enfant (Adjukovic & Adjukovic, 1993; Aristizabal, Palacio, 2003; Kerestes, 2006; Kliewer et al., 2001; Kuterovac, Dyregrov, & Stuvland, 1994; Miller, 1996; Laor, Wolmer, & Mayer, 1996; Punamäki, Qouat, & Sarraj, 1997). Cependant, la mère peut être fragilisée si elle n’est pas elle-même soutenue et donc devenir moins apte à répondre aux besoins de son enfant. Dans une perspective écologique, il semble donc important d’examiner les conditions faites aux parents particulièrement les mères, leur réseau social et le soutien reçu (McCallin, 1991).

Réseaux des parents

Le réseau social est l’ensemble des relations humaines qui produisent un impact durable sur la vie d’une personne. Il est composé par des personnes importantes au regard de l’individu comme la famille proche, les amis, les voisins, les collègues de travail et les personnes de la communauté (Reales de Castro Bohórquez, & Rueda, 1996). Un des effets les plus importants du réseau est le soutien social qui permet la satisfaction des besoins sociaux de l’individu. Plusieurs recherches affirment que le soutien social est déterminant pour réduire la fréquence des symptômes dus à des événements stressants (Cohen & Hoberman, 1983; La Rocco, House, & French, 1980), mais d’autres ne montrent aucun résultat significatif (Billings & Moos, 1984). Selon Kessler et McLeod (1985), seulement certains aspects du soutien, en particulier le soutien émotif et le fait de compter sur un soutien plus large en cas de besoin, aident à maintenir une meilleure santé mentale. Dans les situations de violence politique, ce soutien apparaît comme fondamental. McCallin (1991) observe que les femmes salvadoriennes qui ont une bonne relation avec leur conjoint rapportent peu de problèmes avec leurs enfants. Cependant d’autres recherches ont montré que l’augmentation des relations sociales accroît la probabilité d’éprouver de l’anxiété liée aux relations interpersonnelles (Cohen & Hoberman, 1983).

Dans des conditions de pauvreté (ou de violence sociale), plusieurs chercheurs colombiens ont observé qu’une véritable structuration des réseaux se met en place (Abello Madariaga, & Hoyos, 1996; Abello, Madariaga, & Sierra, 1999; Adler de Lomnitz, 1981; Correa, Palacio, Jimenez, & Díaz, 2009). Les personnes et les familles essaient de se défendre et de se protéger en organisant, comme elles le peuvent, des solidarités en réseau. Par exemple, elles amorcent en fonction de leurs liens de parenté, une série d’échanges réciproques et d’aides, se traduisant en soutien émotionnel et matériel (biens, services, etc.). Etablis spontanément, ces réseaux d’entraide sont garants de leur survie. L’aide est essentielle dans les moments de crise, et la famille apparaît comme la principale source d’aide.

Mais le propre d’un grand nombre de conflits politiques est de déstructurer les réseaux naturels et de contraindre les individus à s’en reconstruire des nouveaux (Boothy, 1992; Farwell & Cole, 2001). C’est un aspect peu étudié de la santé mentale des enfants victimes de violence politique. Cette déstructuration contribue en partie à expliquer pourquoi certains groupes ont plus de difficultés que d’autres à s’adapter dans certaines situations de relocalisation (Palacio & Madariaga, 2006).

Le contexte et la communauté

Le contexte de la violence ainsi que le nouveau contexte de vie dans lesquels se trouvent les personnes sont des dimensions importantes de la santé mentale des enfants et de leur famille. Plusieurs aspects du contexte peuvent exercer directement et indirectement une influence. Il s’agit des aspects culturels et historiques de la société qui peuvent modeler les réactions au traumatisme en y donnant du sens et en procurant des façons d’y réagir, ainsi que de la cohésion et la communication interne au sein des communautés. Les enfants et les adolescents supportent mieux les événements traumatiques y compris le deuil et la séparation lorsqu’ils vivent dans des communautés plus solidaires, comme les kibboutz, ou les unités domestiques étendues que dans les familles nucléaires (Jensen & Shaw, 1993; McCallin , 1991). Dans ce type de structure, les mères et les enfants trouvent des amis et des membres de la famille pour alléger le stress.

La nature et l’intensité du conflit dans les communautés sont également des paramètres. Ainsi, Straker et al. (1996) montrent dans une série de recherche en Afrique du Sud que la violence entraîne plus de perturbations psychiques lorsque les positions institutionnelles des belligérants et les actes de violence sont plus difficiles à comprendre et à repérer. L’incapacité de trouver un sens idéologique à la violence politique est perturbatrice. Garbarino et Kostelny (1996) observent, par contre, des effets paradoxaux de l’intensité du conflit pour les filles. Dans la société palestinienne, plus le niveau de violence dans le quartier est intense, plus les garçons sont à risque de développer des troubles de la santé mentale, alors qu’on observe un effet inverse pour les filles. Dans cette société patriarcale, les filles étant priées de se maintenir à l’écart, elles sont probablement de fait protégées.

L’influence du lieu de vie des personnes après la période de violence (déplacés, réfugiés, immigrés, retour après avoir fui, ou sur place) reste peu étudiée. En général, les familles déplacées souffrent plus que les familles qui sont réfugiées dans un pays à haut niveau d’affluence principalement parce qu’elles continuent à vivre sous la menace, qu’elles sont à la merci de l’aide gouvernementale de leur propre pays qui a parfois une certaine responsabilité dans la violence (Boothy, 1992). Les recherches qui ont comparé les populations déplacées qui vivent en ville et dont les enfants peuvent aller à l’école montrent que malgré des conditions plus sécuritaires de vie et un niveau de vie en apparence similaire, ces familles parce qu’elles ont rencontré plus d’événements traumatiques que celles qui étaient déjà en ville et doivent recréer leur réseau social souffrent plus que les populations sédentaires (Kocijan-Hercigonja, et al., 1998; Kuterovac et al., 1994; McCallin, 1991; Paardekooper et al., 1999).

Le nouveau contexte de vie, même précaire, peut être vécu comme une opportunité par les individus. Ils y voient une certaine sécurité et une opportunité pour augmenter leur qualité de vie (Palacio, 2003). Micklin et Leon (1978, cités par Toussignant, 1992), n’ont pas observé d’effet négatif du déplacement chez les paysans colombiens de la région de Cali ayant émigré vers les villes du fait de la violence dans leur région, leur mobilité géographique a représenté pour eux une mobilité sociale ascendante et leur a procuré une plus grande sécurité physique. Miller (1996) a relevé peu de comportements perturbés chez les réfugiés guatémaltèques, notant que pour les enfants et les familles, le camp de réfugié représentait une sécurité en comparaison de leur situation antérieure. Dans la recherche de Palacio, Abello, Madariaga et Sabatier (1999), quelques personnes, chefs de foyer, chez des familles déplacées, ont souligné que le déplacement leur avait permis de trouver un « petit morceau de terre propre », et d’améliorer le niveau éducatif et les opportunités de s’en sortir pour leurs enfants.

Objectif et démarche de recherche

Dans cette recherche, en nous appuyant sur le modèle écologique intégré de l’impact du trauma d’Elbedour, ten Bensel et Bastien (1993) qui stipule l’influence combinée de plusieurs niveaux de facteurs mais en la modifiant de façon à situer au coeur de la problématique des enfants déplacés, les facteurs reliés à l’expérience traumatique (niveau de confrontation aux événements stressants, et récence) nous avons adopté une démarche analytique en trois temps.

Dans un premier temps, nous avons voulu évaluer et décrire la santé mentale des jeunes adolescents déplacés vivant dans des camps qui leur est spécifiquement dédiés en tenant compte des événements traumatiques subis tant dans leur nature que dans leur intensité et durée et les symptômes de stress traumatique dont ils sont affectés. Ce premier temps qui s’appuie sur le modèle du stress post-traumatique étant descriptif ne permet pas de dégager des hypothèses. Dans un deuxième temps, afin de démêler ce qui relève de l’état de dénuement extrême relié aux conditions actuelles et ce qui relève de l’adaptation des familles à leur environnement et aux expériences vécues, nous avons comparé la santé mentale des jeunes adolescents, et leur situation sociale dont la constitution de leur réseau avec celles de leurs pairs vivant dans des quartiers voisins avec des conditions de pauvreté identique. Cette approche comparative nous permet de cerner l’effet du macrosystème sur les autres systèmes de la niche écologique des adolescents déplacés. Dans un troisième temps, nous avons cherché à identifier les sources de variation de leur santé mentale et éventuellement de leurs interactions en prenant, comme le propose le modèle écologique du trauma, les facteurs reliés aux évènements de vie traumatisants, des réactions au stress et des facteurs protecteurs sur la santé mentale des jeunes adolescents déplacés venant de leurs caractéristiques personnelles (âge, sexe et personnalité) de leur famille et de leurs conditions de vie.

Hypothèses

Ces hypothèses s’appuient sur les deux derniers temps de notre démarche, les premières hypothèses s’appuient sur notre démarche comparative (sexe, et contexte écologique, i.e. déplacés vs sédentaires), la dernière hypothèse s’appuie sur notre recherche des facteurs explicatifs (approche corrélationnelle).

1. Nous nous attendons à des différences de sexe pour les deux populations sédentaire et déplacée, les filles étant plus déprimées, plus anxieuses et plus altruistes et les garçons plus agressifs et plus organisateurs;

2. En comparaison avec les familles sédentaires, nous nous attendons à ce que les jeunes adolescents déplacés rencontrent plus de problèmes de santé mentale et aient des compétences sociales et adaptatives plus faibles, parce qu’ils ont du rompre avec leur environnement social et ont rencontré des événements traumatiques;

3. Du fait du déplacement et donc de la nécessité de se recréer un réseau social, nous nous attendons à une densité plus faible du réseau social avec moins d’entraide pour les familles déplacées que pour les familles sédentaires;

4. En qui concerne la santé mentale des jeunes adolescents déplacés, en nous fiant sur le modèle écologique du trauma d’Eldebour et al. (1993), nous pensons que les événements de vie liés à la violence politique sont un facteur explicatif de la santé mentale directement ou par l’intermédiaire des réactions de stress post-traumatique mais que cette influence sera amplifiée par des événements particuliers et atténuée par des facteurs de protection.

5. Parmi les facteurs de risque, nous nous attendons à ce que la séparation des parents affecte négativement la santé mentale des adolescents, en augmentant la dépression notamment. Parmi les facteurs de protection, nous pensons observer l’effet de l’âge, des compétences adaptatives, du soutien social perçu et des composantes du réseau social.

Méthode

Les participants

Notre étude a porté sur 48 jeunes adolescents déplacés (26 garçons, 22 filles) et 50 pauvres sédentaires (26 garçons, 24 filles) âgés en moyenne de 12,5 ans (e-t= 2,18, étendue 9 à 16 ans) vivant dans la banlieue de Barranquilla, une ville industrielle de la côte caraïbe de Colombie. Les familles déplacées ont été recrutées en partie par la méthode en boule de neige après un premier contact avec un leader1 d’un grand camp de déplacés. Les familles déplacées sont installées dans la région depuis moins de quatre ans et surtout s’autocatégorisent comme déplacées, une catégorie sociale reconnue par les services sociaux de Colombie qui s’applique spécifiquement aux personnes ayant fui leur foyer consécutivement à des faits de violence de groupes armés. Afin d’éviter d’inclure des familles qui prétendaient avoir été déplacées dans le but d’obtenir des avantages sociaux, nous avons pris conseil auprès des leaders dans chacune des communautés de déplacés. Les familles de notre population ont quitté leur village depuis 13 à 18 mois et se sont installées dans le campement après une période d’errance moyenne de six mois, période pendant laquelle les familles ont rencontré diverses situations, en général difficiles. Les familles sédentaires résident depuis plus de 15 ans dans des quartiers voisins. Elles ont été recrutées grâce aux contacts habituels de l’équipe de recherche. Le niveau socioéconomique de toutes les familles est très bas.

Les donnés du tableau 1 montrent une grande similitude entre les deux groupes. On note un même pourcentage de familles étendues (vs familles nucléaires). Les groupes diffèrent de façon minime pour le nombre de personnes au foyer (supérieur pour les familles déplacées) et une plus grande absence du père ou de la mère dans le foyer, légèrement plus fréquente pour les déplacés.

La procédure

Le contact avec les adolescents et leurs familles a été préparé par une rencontre avec le leader des différentes communautés. La recherche a été présentée comme une formation en psychologie sociale et clinique à l’entretien psychologique. Ces activités étaient adressées aux jeunes et aux familles de la communauté. A l’intérieur de chaque famille, nous nous sommes d’abord entretenus avec l’adulte responsable pour lui présenter la recherche et l’interroger sur le réseau social de la famille.

Nous avons ensuite sélectionné au hasard un des jeunes présents au moment de l’entretien avec l’accord de l’adulte responsable. Les objectifs de la recherche ont été expliqués plus précisément à la fin de la passation (chaque passation dure deux à quatre heures reparties parfois en deux sessions). Nous avons pris l’initiative de rester plus longuement en cas de réactions d’amertume.

A la fin de chaque journée de terrain, une séance de discussion avec les intervieweurs et de vérification des questionnaires permet de s’ajuster au mieux à la problématique du terrain, d’éviter le cumul de données manquantes et surtout d’assurer aux étudiants l’occasion d’exprimer leur vécu après ces rencontres. Pour respecter l’éthique de la recherche avec des populations particulièrement vulnérables (Rousseau, 1994), nous avons mis en place, pour les familles qui le demandaient et/ou pour lesquelles nous avions détecté des besoins, un suivi d’au moins trois visites, avec l’aide des étudiants en dernière année de psychologie clinique ayant reçu un entraînement préalable à l’intervention avec des familles en grande précarité avec supervision sur le terrain.

Tableau 1. Description de la population

Les instruments de mesure

Les questionnaires ont été choisis en fonction de leur utilisation dans des contextes de pauvreté et/ ou de violence. La méthode de la double traduction et deux pré-enquêtes, ont permis vérifier leur adaptation à notre population. Les questionnaires sur l’impact de la violence proviennent du «Projet on Children and War» développé au Center for the Study of Human Rights - Columbia University. Leur construction a été réalisée à partir de différentes recherches sur les réactions psychologiques des enfants et des jeunes à la violence politique (Macksoud, 1992; Macksoud & Aber, 1996; Macksoud, Aber, Dyregrov, & Raundalen, 1990; Macksoud, Dyregrov, &t Raundalen, 1993), et en particulier dans un contexte latino-américain (Henríquez & Méndez, 1992, cité par Walton, Nuttal, & Vázquez, 1997). Le questionnaire sur le réseau social est utilisé surtout en Colombie chez les populations en situation de pauvreté.

Réseau social

Le réseau social est mesuré par le questionnaire élaboré par Madariaga, Martinez et Vides (1993) pour les populations pauvres de la région nord de Colombie. Il comprend 60 items avec réponses ouvertes et fermées. Les parents des adolescents participant à la recherche doivent identifier jusqu’à cinq personnes dans les trois catégories suivantes (membre de leur famille dans le quartier et hors du quartier de résidence mais dans la même ville, amis dans le quartier) ce qui permet de calculer l’indice de densitédu réseau (maximum 15). Pour chaque personne répertoriée, ils doivent indiquer la fréquence du contact (indice de contact) et le principal type de soutien donné et reçu par ces personnes dans leur vie de tous les jours selon deux catégories: psychologique (soutien émotionnel) et matérielle (économique et en nature). L’indice de type de soutien est la somme de ce type donné par l’ensemble des personnes identifiées dans le réseau (maximum 15 pour chaque type). En complément de cette mesure, une question a été posée aux adolescents sur le soutien qu’ils perçoivent de la part de leurs parents.

Exposition auxévénements traumatique liésà la guerre intestine

Le CWTQ de Macksoud (1992) est un entretien semi-structuré qui évalue l’exposition des enfants aux traumas de guerre selon le nombre et le type d’événements violents vécus par l’enfant. Il évalue la fréquence des événements vécus et l’âge du sujet pour chaque un d’entre eux. Les 45 événements traumatiques de l’échelle sont regroupés en huit catégories (déplacements, émigration, séparation, deuil, témoin-victime ou auteur d’actes violents, situations de carence). La note de 0 était donnée si le trauma n’avait jamais été vécu, et 1 si l’adolescent avait été confronté au moins une fois au trauma. Tous les adolescents de l’échantillon étant déplacés et ayant du changer de région, les deux premières catégories ne sont pas prises en compte. Deux indices ont été retenus pour les analyses, l’indice de séparation, lorsque l’adolescent a été séparé de l’un ou l’autre de ses parents du fait de la violence, et un indice cumulatif des autres types d’éléments stressant (somme de la présence ou de l’absence d’au moins un événement dans chaque catégorie maximum 8).

Réaction au Stress Post-Traumatique

Le PTSRC de Macksoud et coll. (1990a) est adapté à partir de The Child Post-Traumatic Stress Reaction Index (Frederick & Pynoos, 1988) et de The Post Traumatic Stress Disorder Check List for Children (Dyregrov & Raundalen, 1988). Le PTSRC, est un entretien structuré qui mesure le maintien des symptômes du désordre de stress post - traumatique en rapport à un trauma précis. Il est constitué de 14 items évalués par la présence ou l’absence d’un symptôme donné.

Les questions sont réparties en quatre sections (identification d’un évènement traumatisant, rêves et pensées sur l’évènement, évitement et diminution de réponses, altération de la vigilance), trois questions supplémentaires portent sur la date de l’événement traumatique, l’âge de l’adolescent au moment de l’événement et le moment de la première manifestation des symptômes. Pour chaque sujet, nous avons calculé cinq indices par addition des items, un indice général de PTSD et quatre indices spécifiques à chaque catégorie de symptôme. L’alpha de Cronbach est de .91.

Santé mentale et adaptation psychologique

Le CBI (Macksoud, Aber, Dyregrov, & Raundalen, 1990b) est construit à partir de plusieurs échelles pour les enfants tels que The Behavior Problem Checklist (Quay et Peterson, 1979, cité par Macksoud et coll, 1990b), The Bergen Reaction Index (Dyregrov et Raundalen, 1988), The Youth Self-Repport pour les jeunes de 11 à 18 ans (Achenbach & Edelbrock, 1987) et le Children’s Behavior Questionnaire – Scale A (Rutter, 1967, cité par Macksoud et coll, 1990b). Le CBI est conçu pour être administré directement aux sujets comme un entretien structuré. Le CBI est composé de deux échelles qui évaluent, d’un côté les symptômes de santé mentale en trois domaines (dépression et anxiété et agressivité), et d’un autre côté la dimension adaptative en deux domaines les comportements altruistes et les actions planifiées. Chaque question a cinq choix de réponse "jamais" (0), "quelquefois" (1), "plusieurs fois" (2), "toujours" (3), et le choix « je ne sais pas» traité comme une "non-réponse". Huit questions mesurent la dépression dont quatre portent sur le sentiment de solitude et le lien parent-enfant, six l’anxiété, neuf l’agressivité, sept l’altruisme et sept les actions planifiées. Un exemple de la mesure de l’altruisme se lit ainsi « Est-ce que tu essaies de consoler ou réconforter ceux qui souffrent ? », un pour les actions planifiées « est-ce que tu es bon pour trouver des solutions à des problèmes ? ». L’alpha de Cronbach dans chaque sous-échelle est acceptable par rapport au nombre de sujets (entre .60 et .74).

Résultats

Évènements traumatiques et stress post traumatique chez les jeunes déplacés

Les événements de guerre vécus par les adolescents déplacés sont rapportés au tableau 2. Le nombre moyen d’événements traumatiques (classés par type) en dehors du déplacement mais incluant la séparation des parents est 3,43 (e.t. = 2,16) types d’évènements traumatiques. Deux adolescents (4%) ne rapportent aucun événement traumatique en dehors du déplacement. Ils sont 19% à ne rapporter qu’un seul type d’événement, 13% deux traumas, 19% trois traumas et 45% plus de 3 type de traumas. Les adolescents déplacés sont plus des victimes indirectes de la violence que directes. Seulement 10% ont eu à subir des blessures ou des menaces, et deux adolescents (4%) disent avoir participé quelque peu aux combats. La déprivation est le trauma qui concerne le plus grand nombre d’adolescents (60%), il concerne plus les garçons que les filles. Les participants sont plus nombreux à avoir été témoins de violence sur des biens matériels ou de personnes éloignées (58%) que d’actes de violence sur les proches (43%). Le deuil d’un proche qu’il soit de la famille ou non concerne 50% des adolescents, tandis que la séparation temporaire ou définitive de l’un ou l’autre parent (ou les deux) est le fait de 48%. En somme, en plus du déplacement, les adolescents ont vécu une grande diversité d’événements traumatiques sans qu’un profil-type puisse être dégagé.

Le nombre de symptômes post-traumatiques éprouvés (voir le tableau 3) est en moyenne de 8 (écart-type 3,3). Un effet de l’âge (r = -.31 p < .05) est observé, les plus âgés résisteraient mieux que les plus jeunes, mais il n’y a aucune différence de sexe. Les symptômes les plus fréquents éprouvés par les jeunes adolescents sont la peur ou le malaise à l’évocation de l’événement traumatisant (85%), les sursauts (83%), l’évitement (80% évitent tout ce qui peut rappeler l’événement et 77% ne veulent pas en parler ni y penser) et les souvenirs récurrents (70%). Par contre seulement 41% se sentent plus seuls ou incompris qu’avant les événements et 44% disent y penser. L’âge exerce son effet atténuateur uniquement pour la dimension de l’altération de la vigilance (r = -.45 p < .01).

Comparaison des adolescents déplacés et Sédentaires

Santé mentale et indices d’ adaptation Psychologique

Les données du tableau 4 montrent que les jeunes adolescents ayant subi un déplacement présentent plus de problèmes de santé mentale. Ils sont significativement plus déprimés et plus anxieux mais pas différents pour l’indice d’agressivité. Une analyse item par item des indices d’anxiété et de dépression (non rapportée dans les tableaux), montre une différence entre les deux groupes pour toutes les questions de l’anxiété alors que, pour la dépression, seuls les items portant sur l’état émotionnel de tristesse sont différents, il n’y a pas de différence sur la perception des relations sociales et le sentiment de solitude. Les données concernant les indices d’adaptation montrent des différences pour l’altruisme, et non pour les capacités d’anticipation et de planification. Les adolescents déplacés se montrent plus sensibles aux autres, plus empathiques que les adolescents sédentaires.

Tableau 2. Les événements traumatiques vécus par les jeunes adolescents selon leur sexe

En somme, les adolescents déplacés sont beaucoup plus affectés que les sédentaires, ils sont plus déprimés et plus anxieux, mais également plus orientés vers les autres. Des différences liées au sexe concernent l’anxiété et la dépression, ces différences s’observent dans les deux groupes de la même façon. Les filles déplacées sont les plus anxieuses et déprimées et les garçons sédentaires sont le moins symptomatiques. Aucun effet de l’âge n’est observé dans les deux groupes.

Caractéristiques de leur réseau social

Les résultats concernant le réseau social, tels que rapportés au tableau 5, indiquent des différences dans la constitution des réseaux sociaux des deux groupes. Les parents des adolescents déplacés annoncent un plus grand nombre de membres de leur famille dans leur quartier mais moins d’amis que les sédentaires (respectivement 3,9 contre 2,3 et 1,2 contre 1,9) et au total ils signalent neuf (9) personnes dans leur environnement pour 7,6 chez les sédentaires. Pour les deux groupes, les échanges affectifs sont plus fréquents que les échanges matériels (argent et aide). En ce qui concerne les échanges entre les membres du réseau, il n’ya pas de différences entre les déplacés et les sédentaires pour les échanges monétaires et les échanges de service. Ils sont par contre moins denses pour la dimension affective chez les déplacés que chez les sédentaires (1,7 chez les déplacés contre 5,5). Si les environnements sociaux tels que rapportés par les parents ne diffèrent pas significativement pour les filles et les garçons, les filles et les garçons différent dans leur perception du soutien reçu des parents, les filles rapportant plus de soutien que les garçons.

Tableau 3. Présence de symptômes de stress post-traumatique (PTSRC) chez les jeunes adolescents déplacés

Facteurs explicatifs de la santé mentale

Une série de régressions multiples hiérarchiques pas à pas a servi à examiner pour chacun des deux groupes les effets sur les trois aspects de la santé mentale (dépression, anxiété et agressivité), des facteurs de risque et de protection, selon le modèle écologique du trauma que nous avons remanié. Dans le modèle, nous avons considéré d’abord les facteurs de risque (événements traumatique et réactions de stress), puis les facteurs protecteurs personnels (altruisme et comportements de planification) et enfin les dimensions de l’environnement social tel que perçu par l’enfant et décrit par la famille.

Ainsi pour les adolescents déplacés, nous avons introduit au premier pas de la régression le sexe et l’âge des adolescents, au second, les événements traumatiques dont la séparation des parents, au troisième, les réactions de stress post-traumatique, au quatrième, l’altruisme et les comportements de planification, au cinquième, la perception par les adolescents d’être soutenus par leurs parents, au sixième, les indices de soutien social de l’environnement (financier, instrumental et affectif) tels que recueillis auprès des parents, au septième, la structure de l’unité domestique (nucléaire vs étendue) et la présence de parents au foyer, et au dernier, la taille et la composition du réseau (membre de la famille proche, éloignée, et amis). Le même schéma est suivi pour le groupe des sédentaires avec uniquement les variables les concernant. Les résultats apparaissent dans la première partie du tableau 6.

Tableau 4. Indices de santé mentale et indices d’adaptation. Comparaison des conditions des adolescents déplacés et sédentaires

Afin d’explorer les effets directs et indirects, nous avons conduit également une série de régressions hiérarchiques multiples avec comme variables expliquées les indices de réactions de stress post-traumatique. Les résultats apparaissent dans la seconde partie du tableau 6.

Les résultats concernant les sédentaires (non rapportés ici) n’indiquent aucun effet des variables de la structure familiale, de l’intégration sociale et des indices d’adaptation psychologique hormis l’effet du sexe (R2 = .09; β = .30) sur la dépression.

Les résultats des déplacés apparaissent au tableau 6. Par souci de concision, seuls apparaissent les derniers modèles des régressions hiérarchiques. A noter en premier lieu que les variables démographiques personnelles du sexe et de l’âge n’exercent pas d’influence sur la santé mentale des adolescents dès lors que d’autres facteurs explicatifs sont pris en considération. L’âge exerce une influence uniquement sur le niveau d’altération de la vigilance, et par voie de conséquence sur l’indice total de la réaction au stress.

Tableau 5. Réseau et soutien social selon le parent et selon l’adolescent. Comparaison des conditions des adolescents déplacés et sédentaires

Selon les données de la partie supérieure du tableau 6, le premier palier de notre modèle à savoir les événements reliés à la violence et ses conséquences en terme de stress exerce une influence sur la dépression et sur l’anxiété. La dépression est expliquée à la fois par la séparation des parents et par une forme de réaction au stress à savoir l’altération de la vigilance (également influencée par la séparation des parents). L’anxiété est expliquée par le score total des événements traumatiques.

Le second palier de notre modèle à savoir les traits de la personnalité et compétences sociales expliquent deux des trois dimensions de la santé mentale, l’anxiété qui est atténuée par les capacités de planification, et l’agressivité atténuée par l’altruisme. Parmi les différentes dimensions des paliers de l’environnement deux exercent une influence particulière, il s’agit de l’unité domestique et de la présence d’amis dans le réseau social familial. Autrement dit, d’un part, le fait de vivre dans une unité domestique étendue atténue la dépression et l’agressivité et d’autre part, être inscrit dans un réseau social familial qui comprend des amis en plus des membres de la famille réduit l’anxiété des adolescents.

Par ailleurs, l’analyse de la partie inférieure du tableau 6, indique qu’en plus des événements traumatiques et de l’âge des adolescents, des dimensions de la personnalité des adolescents et de l’environnement social modifient la réaction au stress. L’identification des faites est diminuée par l’aide perçue par les parents mais augmentée par le nombre de personnes de la famille vivant dans le même camp. La réminiscence des événements est atténuée par l’altruisme. L’altération de la vigilance comme l’indice total du stress sont atténués par la présence d’amis au sein du réseau social de la famille.

Une série d’analyses testant des effets médiateurs entre les variables notamment entre l’altération de la vigilance et la dépression a été conduite afin de mieux comprendre l’organisation des inter-influences entre les différents facteurs. Aucune de ces analyses n’a révélé d’effets médiateurs.

Discussion

Cette recherche a examiné dans une perspective écologique du stress post-traumatique la santé mentale des jeunes adolescents colombiens déplacés du fait de la violence en considérant plusieurs niveaux de facteurs explicatifs et en comparant leur santé mentale, leurs compétences adaptatives et le réseau social familial avec ceux des sédentaires vivant dans des conditions de précarité similaires. Nous avons adopté un modèle basé sur celui d’Eldebourg et al. (1993) revisé par Walton et al. (1997) qui repose sur quatre paliers d’influence, le premier étant celui des événements de vie traumatique et des réactions émotionnelles, le second, le niveau des caractéristiques personnelles, d’une part démographiques telles l’âge et le sexe et d’autre part reliées à la personnalité de l’adolescent, telles ses compétences sociales, le troisième niveau, celui du soutien parental et le quatrième, celui de l’environnement social au sens plus large. Après avoir présenté une synthèse rapide des principales informations de cette recherche, la discussion suivra ce fil conducteur.

Les résultats montrent qu’en comparaison avec leurs pairs sédentaires, les jeunes adolescents déplacés sont en moins bonne santé mentale. Ils sont plus anxieux et déprimés mais pas plus agressifs. La régression multiple montre que les dimensions de la dépression et de l’anxiété mais non celle de l’agressivité sont prédites par les événements traumatiques, la dépression par la séparation des parents, et l’anxiété par la somme des autres événements. La dépression est elle-même reliée à un des aspects de la réaction de stress post-traumatique. Il semble donc que le fait d’être déplacé et les événements qui sont reliés à la violence politique exercent des effets sur la santé mentale des jeunes adolescents. Leur nouveau cadre de vie, s’il peut être perçu par certains de leurs parents comme une solution quelque peu apaisante par rapport à la situation antérieure (Palacio et al., 1999), n’offre pas à leurs enfants un contexte suffisamment rassurant et stimulant pour contrebalancer les effets de la violence. Les adolescents déplacés du fait de la violence politique et qui vivent dans des camps qui leur sont dédiés en périphérie des grandes zones urbaines sont vulnérables.

De fait, la population que nous avons étudiée a rencontré des niveaux relativement importants d’événements traumatiques en comparaison avec les niveaux publiés dans d’autres études, par exemple, l’étude de Kliewer et al. (2001) à partir d’une enquête de santé mentale nationale indique un taux de 2% d’adolescents colombiens ayant été séparés des parents ou ayant vécu un deuil du fait de la violence. Dans notre échantillon, 64 % des jeunes adolescents ont vécu trois ou plus traumas en plus du déplacement. Le trauma expérimenté le plus fréquemment (60% des adolescents) est la déprivation. Les niveaux d’événements observés dans cette étude sont, hormis les bombardements et les explosions armées, semblables aux échantillons déplacés en Croatie (Brajsa-Zganec, 2005; Kuterovac et al. 1994) ou au Liban (Macksoud & Aber, 1996) si ce n’est que dans notre étude les jeunes adolescents sont plus souvent séparés de leurs parents. Ils ont toutefois rencontré moins d’événements traumatiques que les populations d’enfants ougandais vivant en camps de réfugiés ou ceux qui ont été recueillis après avoir été enlevés (Amone-P’Olak et al., 2007; Paardekooper et al., 1999). Chaque type de conflit générant des événements traumatiques différents, il n’est pas utile de comparer si ce n’est pour souligner que les enfants et les adolescents, particulièrement les jeunes adolescents, victimes de violence politique interne oubliés par les grandes institutions internationales rencontrent, comparativement à d’autres types de violence, un niveau relativement élevé d’événements traumatiques qui a un effet sur leur santé mentale. Par contre, comme Macksoud et Aber (1996), nous n’avons pas observé de typologie particulière d’événements traumatiques, mais les analyses ont montré des effets spécifiques de certains traumas, notamment la séparation.

Tableau 6. Facteurs précipitants et protecteurs de la santé mentale des adolescents déplacés: régressions multiples hiérarchiques pas à pas

Cet effet différenciateur des événements n’est pas examiné dans la plupart des recherches qui se contentent, soit de décrire les événements rencontrés, soit d’étudier l’effet de leur accumulation. Shaw (2003) conclut dans sa revue de la littérature que c’est plutôt leur somme que des événements particuliers qui est importante. Cependant, deux études qui ont analysé les effets particuliers des événements traumatiques avec des enfants montrent que la séparation a un effet spécifique sur la dépression et le taux de pensées intrusives (Kuterovac et al., 1994; Macksoud & Aber, 1996). Dans notre recherche, elle a un effet sur la dépression et sur l’altération de la vigilance. En ce qui concerne la déprivation, nous aurions pu penser à des effets particuliers mais il se trouve que cette déprivation persistant dans le camp, elle ne semble pas agir seule comme un facteur de différenciation entre tous les jeunes adolescents déplacés.

Les variables personnelles de l’adolescent, le sexe, l’âge et les deux compétences adaptatives l’altruisme et la planification exercent à ces deux niveaux une influence. Les garçons et les filles sont différents. Nous retrouvons la différence habituelle dans les taux de santé mentale annoncés, les filles sont plus déprimées et plus anxieuses que les garçons. Cette différence se retrouve chez les déplacés comme chez les sédentaires. Par contre on ne retrouve pas comme ce qui est observé dans d’autres recherches de différences pour le niveau d’agressivité ou de stress post-traumatique. Comme les enfants libanais étudiés par Macksoud et Aber (1996), on observe une tendance à une différence d’exposition des garçons et des filles. Les filles ont tendance à être plus souvent séparées des parents et les garçons probablement parce qu’ils restent dans les zones de combat plus longtemps rencontrent plus de déprivation. Toutefois, on doit noter d’une part que les différences de sexe pour la santé mentale s’observent également dans les deux populations déplacées et sédentaires, sans effet interactif, et d’autre part que l’effet sexe n’est observé dans les regressions multiples que chez les adolescents sédentaires et uniquement pour la dépression. Il n’y aurait pas de sensibilité particulière, ni des filles ni des garçons, aux influences des événements traumatiques comme cela a pu être observé ailleurs.

Dans notre échantillon, l’âge n’explique que la dimension du stress post-traumatique et plus particulièrement l’altération de la vigilance. En dehors des problèmes de concentration, les adolescents plus âgés ont moins de problèmes d’altération de la vigilance que les adolescents plus jeunes comme si la maturité renforçait leurs fonctions exécutives leurs permettant de mieux maîtriser leurs émotions. Par contre les deux compétences adaptatives et les trois indices de la santé mentale ne sont pas liés à l’âge.

Les deux compétences adaptatives de l’altruisme et de la planification prédisent négativement avec un poids b supérieur à .30, c’est-à-dire non négligeable, les indices de santé mentale. L’altruisme prédit négativement l’agressivité, se préoccuper des autres et être agressif sont deux dimensions qui ne sont pas compatibles. La planification prédit négativement l’anxiété. Ce sont donc bien des dimensions protectrices pour les jeunes adolescents. Malgré la présence d’un taux d’événements traumatiques relativement élevé, on n’observe pas de diminution de ces compétences. Au contraire, les données comparatives indiquent un niveau d’altruisme supérieur chez les adolescents déplacés que chez les sédentaires, sans que cela soit relié ni à l’âge ni au niveau d’événements rencontrés. Macksoud et Aber (1996) ont observé également dans leur étude avec les enfants libanais que ceux qui dans leur échantillon qui avaient été déplacés (17% de leur échantillon) avaient des niveaux d’altruisme plus élevés que les autres. Il est possible que l’expérience du déplacement en grands groupes dans des conditions dramatiques d’urgence éveille chez les jeunes adolescents le sens des autres et la nécessité de s’occuper de ceux qui sont dans le besoin affectivement. Mais il se peut que les familles déplacées venant le plus souvent de milieux ruraux soient plus éveillés au sens collectif du fait des caractéristiques de la ruralité.

Les trois mesures reliées à la famille, la séparation ne serait-ce que temporaire mais dans le contexte de l’urgence liée à la violence, la perception de l’aide perçue des parents par les adolescents eux-mêmes et la constitution de l’unité domestique, indiquent que celle-ci est un élément stabilisateur important pour les jeunes adolescents déplacés. La séparation de l’un ou l’autre des parents est un facteur prédicteur de la dépression et de l’altération de la vigilance. Cet aspect n’est pas régulièrement mesuré dans les recherches sur les réactions aux contextes de violence politique, pourtant les quelques auteurs qui ont pris cette dimension en compte montrent son effet dépressif sur les enfants. Cela rejoint les études de Rutter (1974). Dans notre échantillon, il dépasse l’effet du deuil de personnes proches. Il semble donc bien que ce soit les parents comme agents structurants psychiquement et protecteurs qui soient importants. On doit également noter que si les adolescents déplacés sont plus déprimés que les adolescents sédentaires, ils ne se sentent pas moins aimés et plus seuls que les sédentaires. Ce qui est atteint se sont les affects de tristesse, d’apathie et d’impuissance et non les dimensions relationnelles.

L’aide perçue par les parents prédit négativement l’identification des faits, comme si elle permettait de ne plus se concentrer sur les événements traumatiques, ou comme si parce que les parents avaient protégés leurs enfants, ils ont été cognitivement moins sensibles à ces événements et à leur suite. Cet effet protecteur du soutien parental a été observé par Kliewer et al. (2001), les la perception d’être soutenu par leurs parents pas celle du soutien des pairs contrecarre les effets des événements traumatique chez les adolescents. Enfin, une dimension déjà observée par McCallin (1991) et Jensen et Shaw (1993) par le contexte de vie familiale, dans notre cas, l’unité domestique sert d’élément protecteur. Le fait de vivre dans une famille étendue comparé à une famille nucléaire prédit négativement et la dépression et l’agressivité. Nous n’avions pas anticipé réellement cette donnée, mais elle peut s’expliquer par un nombre d’interactions accrues avec le jeune adolescent. Plusieurs adultes peuvent dans la situation de famille étendue se partager les tâches et il y a probablement toujours un adulte à la disposition de l’adolescent pour l’encadrer et l’écouter. La demande de participer aux tâches domestiques vitales qui éloignent les adolescents de leurs amis ou de leurs tâches scolaires dans le cas de familles nucléaires où le nombre d’adultes est plus réduit est probablement une autre explication.

Comme le soulignent plusieurs auteurs qui préconisent l’approche écologique du trauma ou une approche communautaire, nous avons pris en compte les caractéristiques du réseau social des personnes victimes de la violence politique. La nouvelle situation oblige les familles à recréer un réseau social. Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, les données comparatives des réseaux sociaux montrent que les familles déplacées annoncent un réseau social plus dense que les familles sédentaires, ce qui s’explique par un réseau familial plus dense dans leur quartier et dans d’autres quartiers de la ville, mais qui camoufle un réseau amical nettement plus faible. En outre, les échanges sont essentiellement concrets et de première nécessité, il y a nettement moins d’échanges affectifs pour les familles déplacées que pour les familles sédentaires. Manifestement, les familles déplacées semblent mettre une grande énergie pour reconstituer un réseau social dans lequel elles pourraient fonctionner, ce n’est pas suffisant pour atténuer le stress psychologique généré chez leurs enfants par la violence politique.

La faiblesse du réseau social des familles déplacées tient à la petite taille du réseau amical et aux faibles échanges affectifs au sein du réseau. Abello et al. (1999) ont observé avec les familles vivant dans des conditions précaires en Colombie que les membres de la famille procurent plus que les autres sources du soutien émotionnel tandis que les amis et les voisins grâce aux moments ordinaires de la conversation quotidienne entre voisins permettent de trouver des solutions à leurs problèmes surtout lors des crises. Dans leur étude, les familles qui ont un réseau amical sont plus attentives aux besoins de leurs enfants, elles sont moins autoritaires et leurs donnent plus de conseils que celles qui n’ont que leur réseau familial voire même sont isolées.

Dans notre recherche, aucune des variables de la nature du soutien n’intervient dans la santé mentale des jeunes adolescents mais ce sont les dimensions de la constitution du réseau qui fait la différence. On note, en effet, que le nombre d’amis de la famille dans le quartier diminue le stress et surtout l’altération de la vigilance et l’anxiété. Par contre, le nombre de membres de la famille augmente la mémoire des faits. Bien que nous n’ayons pas observé d’impact de cette mémorisation des faits sur la santé mentale des adolescents, on peut s’interroger sur son impact à long terme. Deux issues semblent possibles, soit permettre de donner du sens à la souffrance en procurant une explication au mal-être, soit générer la rumination et dans ce cas aurait un effet négatif en empêchant de partir sur des bases positives. L’étude des corrélations et l’analyse d’éventuels effets médiateurs entre différentes variables soulignent bien que les réactions des adolescents déplacés aux événements traumatiques sont bien multiformes. Bien que l’anxiété et la dépression soient deux dimensions corrélées, l’analyse de leurs prédicteurs montre que ce sont deux dimensions qui doivent être distinguées. Comme de nombreux auteurs qui se sont intéressés aux conséquences de la violence politique nous pensons que les jeunes adolescents ont une gamme assez étendue de réactions et que la manifestation de leur détresse s’exprime de multiples façons. C’est pourquoi nous pensons qu’il est probablement réducteur de ne considérer comme indice que le stress post-traumatique. Le fait que la séparation des parents agit principalement sur la dépression et l’altération de la vigilance alors que la somme des autres événements traumatiques influence la réminiscence des événements et l’anxiété devrait attirer les cliniciens et les chercheurs en clinique à adopter une approche plus large des conséquences de la violence.

L’absence d’effet des variables de la famille et de l’environnement social chez les adolescents sédentaires peut probablement s’expliquer par la nature de nos questions. Les indices tant de la famille que de l’environnement social sont plutôt globales, il est possible qu’elles n’aient pas être aptes à capter des variations au sein de la population sédentaire, comme l’auraient pu l’être des mesures sur les pratiques et les styles éducatifs (par exemple, attitude attentionnée ou autoritaire des parents) ou des questions plus précises sur le soutien social (fréquence, qualité et satisfaction). Le fait que ces mêmes dimensions aient expliqué la santé mentale des adolescents déplacés souligne l’importance crucial de la famille et du soutien dans leurs aspects élémentaires pour la santé mentale des déplacés.

Limites de la recherche

La faible taille du groupe des adolescents déplacés ainsi que quelques difficultés rencontrées sur le terrain avec certaines mesures limitent la portée de cette recherche et restreignent la généralisation des résultats. A l’issue de cette recherche, nous avons l’impression qu’une recherche ultérieure devrait mieux calibrer pour la population déplacée colombienne, certaines mesures notamment celle sur le stress post-traumatique, et une organisation plus resserrée des questions sur le réseau et le soutien social ainsi que sur le rôle des parents permettrait de mieux appréhender les interrogations soulevées ici.

Conclusion

Cette recherche, une des rares en Colombie qui ait adopté une approche quantitative avec un modèle écologique du trauma, nous apparaît être une contribution significative, en dépit des quelques limites énoncées plus haut, pour les connaissances sur les processus psychologiques d’adaptation des adolescents déplacés en Colombie. Les adolescents déplacés sont vulnérables, ils ont rencontré un nombre relativement élevé en comparaison avec d’autres situations violence qui attirent l’attention de la communauté internationale. Ils réagissent par de la dépression et de l’anxiété. Nous retenons comme éléments de force les processus différents pour l’anxiété et la dépression, deux aspects de la santé mentale des adolescents qui sont atteints, l’importance des parents, notamment l’effet déstabilisateur de la séparation parentale dans un contexte d’urgence, même transitoire, l’importance du réseau social avec deux aspects stabilisateur, la vie dans une unité domestique étendue et la présence d’amis dans le réseau social. Nous espérons que cette recherche puisse être utile aux intervenants sur le terrain.

Remerciements

Cette recherche a été rendue possible grâce à une subvention du programme ECOS-Nord (N° CF99H03) accordée au premier et second auteur, le soutien financier du CIDHUM (Centro de Investigaciones en Desarrollo Humano), et les encouragements de Jose Amar directeur du Centre et de Raimundo Abello responsable scientifique Universidad del Norte.

NOTES

1. Un leader dans les camps de déplacés sont des personnes identifiées et reconnues par les autres membres du camp qui servent d'interlocuteur pour les organismes sociaux et les ONG et qui voient à l'organisation du camp.


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